Toison d'or ou Toisons d'or
Hervé Pinoteau
Vice-président de l'Académie internationle d'héraldique
Ce titre est le simple reflet d'une interrogation fréquente devant l'existence de deux ordres de la Toison d'or, l'espagnol et l'autrichien.
Autrement écrit, chacun des deux ordres se pensant légitime, existe-t-il véritablement deux ordres, ou deux vérités ?
Revenons aux sources, c'est-à-dire aux statuts que je lis, pour faire simple, dans l'édition de Vienne en 1914.1
Ces statuts furent donnés à Lille le 27 novembre 1431 par " Philippe par la grâce de Dieu,2 Duc de Βourgoingne, de Lothier, de Brabant, & de Lembourg : comte de Flandres, d'Arthois, de Bourgogne Palatin3, de Haynnault, de Hollande, de Zelande, & de Namur : Marquis du Sainct Empire : Seigneur de Frize, de Salins, & de Malines ,, qui rappelle la fondation de l' ,, Ordre de la Thoison d'Or ,, à Bruges, le 10 janvier 1429 (ancien style, donc 1430 nouveau style) lors de son mariage avec Elizabeth, autrement dit l'infante de Portugal Isabelle.4 Au chapitre5 premier, le duc déclarait que l'ordre aurait trente et un chevaliers « dont nous en nostre temps, serons l'un, Chief & Sοuverain, & après Nous nos successeurs Ducz de Bourgoingne "· Αu ch. ΧΧ il est écrit que l'église « de nostre Chapelle des Ducz ", " en nostre ville de Dijon, en nostre Duché de Bourgoigne ,, est la chapelle où se font les services de l'ordre et (ch. ΧΧΙ) sont placées les écus aux armes, heaumes, timbres (cimiers) et hachements (lambrequins) du souverain et des chevaliers. Au ch. LXV il est prévu qu’à la mort d’un souverain laissant un fils mineur, les chevaliers éliront un chevalier pour administrer l’ordre. De même, si le souverain meurt en laissant une fille héritière non mariée, on agira de même, jusqu’à ce qu'elle soit mariée à un chevalier en âge de conduire l'ordre en tant que nouveau souverain. Après le ch. LXVI, un long texte suit où il est question de « noz hoirs & successeurs, Ducz de Bourgoingne, Chiefz, & Souverains de nostre present Ordre, & amiable Compaignie de la Thoison d'or », de « nosdicts successeurs Ducz de Βourgoingne Souverains dudict Ordre ». ..
La Toison d’or est donc l’ordre des ducs de Bourgogne.
Qu'est-ce que la Bourgogne ? C'est un duché français, dont le duc est premier pair laïque de France. Contrairement à une idée commune, ce n'est pas un apanage : ce duché n'est donc pas assujetti à la loi de masculinité. Α l'extinction de la première famille capétienne en 1361, Jean ΙΙ le Βοn hérita du duché et le réunit à la Couronne, puis il le donna à son quatrième fils, Philippe, qui l'avait accompagné jusqu’au bout à Poitiers, d'où son surnom de Hardi ; cet acte sera confirmé par son fils aîné, Charles V. Dans ces deux actes en date du 6 septembre 1363 et du 2 juin 1364, il n’y avait aucune clause de masculinité : le duché pairie était transmissible aux héritiers provenant de légitimes mariages.6 Le duché de Bourgogne fut donc un fief ayant une possible succession féminine, et l’on sait que toutes les successions de ce genre furent abolies par l’édit de Marly, en date de mai 1711, enregistré au parlement de Paris le 21 de ce mois.7 A partir de ce moment il n’y eut plus que la succession par voie masculine pour les duchés et pairies de France.
A la mort de Charles le Hardi ou le Téméraires, 2e chef souverain de la Toison d’or (devant Nancy, 5 janvier 1477), sa fille unique Marie de Bourgogne, duchesse de Brabant, etc. se déclara duchesse de Bourgogne, mais Louis XI excédé des crimes, violences et trahisons de « Charles de Bourgongne » reprit la Bourgogne, qualifiée d’apanage ( !) et ses autres fiefs français, ce qui était bien le moins pour un criminel de lèse-majesté8.
Marie se maria à Maximilien, duc d’Autriche, qui devint ainsi 3e chef et souverain de l’ordre, puis mourut en 1482. Maximilien devint archiduc d’Autriche, puis roi et empereur élu des Romains et légua à sa postérité des prétentions à la Bourgogne, nettement affirmées avec son petit-fils l’empereur roi Charles Quint que le parlement de Paris pouvait convoquer en tant que « Charles d’Autriche, comte de Flandre ».
On ne s’attardera point aux péripéties advenues entre la maison d’Autriche et nos Rois. Ceux-ci acceptaient cependant la Toison d’or sans toutefois en porter l’insigne : François 1er (1516), François II (1560) et Charles IX (1565) furent donc chevaliers.
Le prestige de l’ordre était tel que les statuts du Saint-Esprit déclarèrent que ses chevaliers pouvaient accepter la Toison d’or et la Jarretière (art. XXXVII), mais nos Rois n’acceptèrent jamais les titres déplacés pris par les rois catholiques d’Espagne, comme celui de duc de Bourgogne. Pour que les choses soient bien claires, Louis XIV conféra le simple titre de duc de Bourgogne au fils aîné du Grand Dauphin (1682), ce prince n’ayant évidemment point l’administration du duché, de même que son frère Philippe n’eut point celle du duché d’Anjou. Louis XV conféra aussi le titre de duc de Bourgogne au fils aîné de son propre dauphin (1751). Depuis la mort de ce petit et courageux prince en 1761, nul ne fut plus titré duc de Bourgogne dans la maison de France.
Suzerain du duc de Bourgogne, le roi de France pouvait-il assumer la souveraineté de la Toison d’or ? Selon Brantôme, Louis XI se serait demandé si la chose était possible, la lignée de Bourgogne ayant « failli en la fille Marye de Bourgoigne » et le Roi étant chef de tout, mais on considéra qu’il n’était pas séant de se rendre chef de l’ordre du vassal, ni de le maintenir, ni de le conférer9. Après la paix de Nimègue (1679) qui vit la Franche-Comté et une bonne partie de la Flandre revenir au royaume, on pensa que Louis XIV pourrait assumer la Toison d’or, mais le Roi-Soleil n’en fit rien (1680)10.
Dernier roi d’Espagne de la maison d’Autriche, Charles II mourut le 1er novembre 1700. Son plus proche héritier était le Grand Dauphin comme fils de sa sœur aînée et petit-fils de sa tante aînée. Le Grand Dauphin et son fils aîné le duc de Bourgogne étant automatiquement réservés à la France, restait le deuxième fils du Grand Dauphin, Philippe de France, duc d’Anjou qui devint ainsi Philippe V roi d’Espagne et des Indes par proximité de parenté, par testament de Charles II signé après avis favorable du pape11, et acceptation de Louis XIV en date du 16 novembre.
Le nouveau Roi catholique prit l’insigne de la Toison d’or sans cérémonie le 2 décembre et c’est à Madrid qu’il reçut le collier, lors d’une cérémonie en date du 5 mai 1701.
La maison d’Autriche éleva des prétentions en soutenant que l’Espagne, comme la Toison d’or, devaient revenir à la branche cadette subsistante à Vienne. La chose était peu défendable pour les couronnes espagnoles qui passaient alors par femme, et la chose était évidente pour la Toison d’or : à la mort de Charles le Téméraire il existait encore un Capétien, petit-fils de Philippe le Hardi, le duc investi en 1363 et 1364 : Jean de Bourgogne, comte de Nevers, de Rethel, etc. mort sans postérité mâle en 1491. Or ce prince ne réclama point le duché et la souveraineté de la Toison d’or.
L’aîné de la branche cadette devenue aînée n’était autre que Léopold 1er empereur élu des Romains, roi de Germanie. A Vienne, le 12 septembre 1703, ce chef de la maison d’Autriche, en compagnie de son fils aîné, Joseph 1er roi des Romains et de Hongrie, cédait la monarchie espagnole à son deuxième, Charles archiduc d’Autriche12 qui se titra donc Charles III roi d’Espagne, etc. On sait qu’il tenta sa chance dans la péninsule ibérique, mais sa position devint inconfortable quand son père mourut en 1705 ; suivit peu après la mort de Joseph 1er devenu empereur des Romains (1711). Charles III d’Espagne devint donc Charles VI roi des Romains par élection et empereur élu des Romains par couronnement. C’est alors qu’il se mit à faire des chevaliers de la Toison d’or (1712)13, bien qu’ayant été chassé d’Espagne par Philippe V aidé par le duc de Vendôme (1710-1711).
Il est vrai que l’empereur Charles VI, chevalier de la Toison d’or depuis 1697, avait pu mettre la main sur le trésor de l’ordre qui était resté à Bruxelles. En effet, Philippe V avait perdu les Pays-Bas « espagnols » qu’il avait dû céder à l’empereur archiduc lors de la paix de Rastadt en 1714. C’est ainsi que la maison d’Autriche put parer ses prétentions d’ornements usurpés et qu’elle insista sur une compréhension très large de la notion de Bourgogne pour garder la Toison d’or.
Dès 1701, Philippe V conféra légitimement la Toison d’or en se déclarant toujours duc de Bourgogne, bien qu’issu de rois d’Espagne ayant abandonné toute prétention sur ce fief, Charles Quint compris14.
Les lettres patentes du Roi catholique comportaient des titres impossibles pour la France : roi de Navarre, duc de bourgogne, comte de Flandres et l’on sait que le parlement de Paris ne put approuver ces titres lors de la séance du 15 mars 171315. C’est ainsi que lors de la réception de Français en France dans la Toison d’or, on ne lisait point les lettres patentes espagnoles, écrites en bon français, langue de l’ordre, et que celui qui conférait le collier au nouveau chevalier au nom du chef souverain, se contentait de dire : « le roi d’Espagne (ou le Roi catholique) chef et souverain du très noble ordre de la Toison d’or vous a élu chevalier... 16 », ce qui se faisait encore sous la Restauration.
Les Puissances européennes essayèrent de s'entremettre pour arrêter le scandale des deux ordres, surtout quand Charles VI mourut (1740) en ne laissant qu'une fille, Marie-Thérèse. Elle épousa François, ancien duc de Lorraine qui ne put être élu et couronné empereur qu'en 1745 : ainsi naquit une nouvelle maison d’Autriche que les généalogistes nommèrent de Habsbourg-Lorraine, nom qui resta pour l’état-civil de la République d'Autriche abolissant titres et qualifications.
Dixième chef et souverain de l’ordre, Philippe V abdiqua la couronne d'Espagne et la souveraineté de la Toison d’or en faveur de son fils aîné qui devint Louis 1er (San-Ildefonso, 10 janvier 1724), allant jusqυ'à préciser que la souveraineté de l’ordre illustre (insigne) était annexée à la couronne17. Or, au congrès de Cambrai destiné à régler les différends entre l’empereur et l'Espagne, on avait décidé que Charles VI et Philippe V garderaient chacun les titres contestés jusqu'à leur mort. Philippe V puis Louis 1er, Philippe V à nouveau et enfin Ferdinand VI se virent donc autorisés à protester devant le maintien des prétentions autrichiennes après la mort de Charles VI. C'est à Aix-la-Chapelle qu’un nouveau pas fut franchi. L’article 13 des préliminaires signés le 30 avril 1748 annonçait que S.M. Britannique, S.M. Très Chrétienne et les Seigneurs des Etats-Généraux des Provinces Unies (des Pays-Bas) s'engageaient a proposer leurs bons offices pour faire régler à l’amiable lors d’un congrès à venir la question de la grande maîtrise de la Toison d'or. Α Aix, le 20 novembre suivant on vit le marquis de Soto Mayor, ambassadeur de S.M. Catholique (Ferdinand VI) protester contre cet article, l'ordre étant attaché irrévocablement à la couronne d'Espagne, ce qui entraîna une contre-protestation du comte de Kaunitz-Rittberg, ambassadeur de l’impératrice reine Marie-Thérèse, en date 26 suivant. Les choses en restèrent là, mais les titres espagnols furent abandonnés avec Marie-Thérèse : cette souveraine et sa descendance ne gardèrent que des quartiers espagnols dans leurs armes jusqu’en 1866 : Castille, Léon, Aragon, Aragon-Sicile, Indes (à la mode autrichienne) ... Les armes de Bourgogne (le bandé à bordure) disparurent en 1804 quand l’empereur élu des Romains François ΙΙ devint aussi empereur héréditaire d’Autriche en modifiant ses armoiries, de même que le titre ducal de Bourgogne dans le grand titre impérial et royal. Ι1 ne fallait point indisposer Napoléon 1er ... Jusqu’en 1918 le titre et les armes de duc de Lorraine restèrent cependant dans le grand titre et dans les armes de la maison d’Autriche, la convention de Vienne en date du 28 août 1736 légitimant le souvenir de l’origine de la maison d’Autriche si on remonte la lignée par les seuls mâles19
Le souvenir de la Bourgogne se réfugia dans les diplômes de la Toison d'or autrichienne. On y reviendra.
L’ordre continua sa vie à Madrid et l'on sait combien il fut lié aux Bourbons de France, des Deux-Siciles et de Parme Je ne puis évoquer ici que le serment ,spécial et commun aux ordres du Roi (Saint-Michel et Saint-Esprit) et de la Toison établi à Marly le 19 février 1740, ainsi que la convention d'Aranjuez en date du 5 juin 1760 pour l'échange des ordres de France et la Toison d'or parmi les princes de la maison de Bourbon. Louis XV et son dauphin reçurent la Toison d’or en 1736, et sans compter tous les princes français, énumérons d'autres chevaliers : Louis XVI, Louis XVIII, Charles Χ, Louis ΧΙΧ et Henri V (ces deux derniers rayés par Isabelle ΙΙ en 1836), Napoléon 1er, et les siens (Louis XVIII exilé en renvoya son collier à Charles IV !), Louis-Philippe 1er et trois de ses fils, Napoléon III et son fils, les présidents Thiers, de Mac-Mahon duc de Magenta, Grévy, Faure, Loubet, Poincaré, Doumergue ... La Toison d'or fut l'ordre de Vendôme, de Ducasse, de Belle-Isle, de Choiseul, de Montmorin, de Talleyrand, de Talaru, de Villèle, de Chateaubriand, de Soult duc de Dalmatie, de Guizot ... Nos Almanachs royaux, impériaux et nationaux ne connaissaient que l'ordre espagnol de la Toison d'or.
Les Espagnols firent de leur mieux pour soutenir le prestige de la Toison d'or, mais les Cortès de Cadix nommèrent Wellington en 1812 au nom de Ferdinand VII qui subissait alors le doux exil de Valenςay où il buvait à la gloire des victoires de Napoléon 1er. Ce fut la porte ouverte à une démolition des traditions, le Britannique étant protestant. Revenu sur son trône, le Roi catholique continua en nommant des protestants, des orthodoxes et on vit même, au cours des XIXe et XXe siècles, des musulmans et des membres d'autres religions. Bien qu'ayant nommé un protestant (le prince régent du Royaume-Uni, futur Georges IV), les Autrichiens eurent beau jeu de critiquer de telles nominations.
Reine illégitime pour les rois carlistes qui donnèrent très peu l'ordre en exil, Isabelle ΙΙ assuma la souveraineté de l'ordre alors qu'elle aurait dû la conférer à son mari le roi François d'Assise de Bourbon, mais elle n'en porta jamais les insignes sur elle, le collier étant réservé aux seules armoiries. Cette reine décréta les 26 juillet 1847 et 28 octobre 1851 que la Toison d'or était un ordre royal à caractère civil qui devait continuer à être régi par ses anciens statuts (sic), que les nominations devaient être faites qu'après accord du conseil des ministres et qu’elles devaient être publiées dans la Gaceta de Madrid dans le délai d'un mois.
La connexion entre la couronne et l'ordre qui avait fait donner ce dernier par Joseph-Napoléon 1er (ses chevaliers furent rayés de l'ordre en 1814), entraîna encore le don de la Toison d'or par le régent duc de la Τorre quand Isabelle ΙΙ fut chassée (1868-1870), puis par le roi Amédée 1er, qui était un Savoie (1870- 1873). La 1ère République abolit l'ordre (1873) qui revécut avec Alphonse ΧΙΙ (1874) et Alphonse ΧΙΙΙ : le dernier Roi catholique fit la dernière cérémonie de l'ordre au palais de Madrid le 1er avril 193120 et partit pour l'exil quelques jours après ; il n'aurait nommé qυ'un seul chevalier au loin, son petit-fils qui est l'actuel souverain21
La IIème République abolit l'ordre dès 1931 par un décret qui ne fut jamais révoqué et Franco ne conféra point la Toison d'or, portant lui-même le collier- de Charles ΠΙ et d'autres ordres espagnols.
Jusqu'à 1931 les actes de l’ordre étaient rédiges et signalés en franςais23. Dona Isabel ΙΙ était alors « Elisabeth, par la grâce de Dieu et par les constitutions de la monarchie espagnole, reine des Espagnes, comme duchesse de Bourgogne, chef et souveraine de l'ordre de la Toison d'or », et signait « Elisabeth », et non Yo la Reina24. De même : "Alphonse ΧΙΙΙ, par la grâce de Dieu et par la constitution, roi d'Espagne, comme duc de Bourgogne, chef et souverain de l'ordre insigne de la Toison d'or ", signait " Alphonse " et non Yo el rey25 Avec le comte de Barcelone une simple lettre n'était qu'un mélange de noms en espagnol et de texte en mauvais français, signé Juan26 S.M. le roi Jean-Charles 1er, ne signe qu'un décret espagnol dactylographié et orné de ses armes, sans aucune titulature : Juan Carlos R, contresigné du premier ministre27 On sait que sans modifier les statuts, des souveraines étrangères sont maintenant faites membres de l'ordre et pour éviter le terme de chevalier il est écrit qu'on leur concède le collier.
Jusqu’au XIXe siècle, l'ordre bénéficiait de la symbolique bourguignonne dans ses sceau et contre-sceau de cire, mais Alphonse ΧΙΙΙ semble n'avoir utilisé qu'un sceau en papier gaufré orné d'armoiries, le document étant gravé avec des armoiries du fondateur (le duc Philippe le Βon) et du Roi catholique27. Le comte de Barcelone utilisa un simple cachet en cire.
Après que le comte de Barcelone eut abdiqué ses droits de chef de la famille royale le 14 mai 1977, son fils commença à conférer la Toison d'or à peu de personnes et tous les Espagnols non-dynastes auxquels il donna le collier sont morts depuis. Il ne reste donc actuellement que douze chevaliers dont des dames, les statuts en autorisant cinquante et un dont le chef souverain29.
Le statut juridique de l'ordre étant incertain, des Espagnols s'inquiètent au sujet de son fonctionnement, espérant que le souverain s'affrancl1isse du contrôle gouvernemental à l'imitation du feu roi du Royaume-Uni qui s'en est affranchi en 1946 pour la Jarretière d'Angleterre et le Chardon d'Ecosse, par simple accord avec le premier ministre30.
Il est à remarquer que les armoiries du royaume d'Espagne ne comportent pas le collier de l'ordre et que celui-ci est administré par la Maison du Roi, et non point, comme avant, par le ministère des affaires étrangères, ainsi que par les quatre officiers classiques31.
L'ordre autrichien de la Toison d'or s'est donné des aspects de respectabilité en continuant des cérémonies publiques jusqu’'en 185232 et l'on sait que l’empereur fit main basse sur le trésor et les archives restés à Bruxelles : devant l'arrivée des armées républicaines (1794), ce somptueux ensemble fut envoyé à Vienne où on peut encore admirer le trésor en la Schatzkammer de la Hofburg qui dépend du Kunsthistorisches Museum33.
Cet ordre se garda bien d'avoir une apparence étatique et fut lié à la maison d'Autriche. Les lettres patentes de nomination en français étaient gravées, par exemple, au nom de "François Joseph premier, par la grâce de Dieu, empereur d'Autriche ... (suivaient tous ses titres) ... chef et souverain de l'illustre ordre de la Toison d'or ", signant" François Joseph" et non Franz Joseph, contresigné par le chancelier et le greffier, évidemment en français, le tout scellé du sceau de l'ordre en cire, aux armoiries du fondateur et pendant au parchemin par des cordons dorés34. Au-dessus de la titulature étaient gravées les seules armes de maison35, l'écu tiercé en pal de Habsbourg, d'Autriche et de Lorraine, timbre de la couronne royale fermée, environné du collier de l'ordre et de deux aigles couronnées, l'une tenant le sceptre et l'autre l'épée ; en bas la devise Ante ferit quam flamma micet, il faut frapper pour faire jaillir la flamme.
Finalement, le premier ordre de la monarchie austro-hongroise qui était décerné aux souverains ne pouvant être chevaliers de la Toison d'or autrichienne, ainsi qu'aux autres dynastes dans ce cas, était la grand-croix de Saint-Etienne de Hongrie.
La chute de l'empereur roi Charles Ier - IV et sa mort en 1922 firent que le trésor et les arcl1ives eurent un statut peu clair.
Α la majorité du fils aîné du dernier souverain (1932), de nouveaux chevaliers furent nommés. La liste de ceux-ci est assez confidentielle et commence par « Othon d'Autriche, chef et souverain de l'Ordre ", nom dynastique de celui qui s'est marié à Nancy comme duc de Lorraine et qui est député européen allemand sous son nom officiel autrichien de Ηerr Dr Otto Habsburg, sans plus. Tous les papiers de l'ordre (lettres de nominations, listes, annonces de nominations, de décès et de cérémonies) sont en français. L'ordre reste une corporation vivante et qui rassemble ses membres pour la messe des défunts et la messe de la Saint-André, le lendemain, chaque fin novembre, en la chapelle de l'ordre Teutonique (Singerstrasse 7, Vienne 1er). Le chef souverain considère que l'ordre est le symbole de l'« Orbis europeus christianus cher à Charles Quint »36 quand il ne voit pas la couronne impériale de Vienne tenir ce rôle dans une Europe qui ne serait que la continuation du Saint Empire37.
Le nombre actuel des chevaliers serait de quarante-deυx38 et on a la surprise de voir parmi eux " Albert ΙΙ roi des Belges " et " Jean grand-duc de Luxembourg " qui sont aussi chevaliers de la Toison espagnole, mais ce fut le cas de Georges IV du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande. On voit encore parmi ces chevaliers qui sont tous catholiques (cet ordre tient à cette tradition religieuse), un Français s'occupant d'une association relative à la civilisation chrétienne. Le premier Français a être entré dans l'ordre fut le duc d'Orléans quand il épousa une archiduchesse en 1896, reniant ainsi la tradition des siens, mais pouvait-il éviter l'ordre ?39
Il existe entre la Toison d'or autrichienne considérée comme personnalité juridique indépendante de droit international, et la République d'Autriche un accord de dépôt des archives et du trésor (1953)40. La garde du trésor est ainsi assurée dans la Schatzkammer de la Hofburg, les objets étant tenus a la disposition de l'ordre pour les cérémonies ; leur prêt pour des expositions doit être autorisé par l'ordre. Les archives sont déposées a la Haus-, Hof- und Staatsarchiv de Vienne, autrement dit les archives nationales.
Alors Toison d'or ou Toisons d'or? Nous sommes pratiquement en présence de deux ordres : 1) l'autrichien qui maintient une tradition corporative à tendance européenne dans les mains du chef de la maison d'Autriche pour confirmer ses ambitions politiques, et qui conserve de précieux souvenirs usurpés ; 2) l'espagnol qui est de filiation légitime et de vie véritablement sans faste pour ne pas dire atypique, mais qui mérite mieux, ne serait-ce que par une modification des statuts, à l'imitation de ce qui se fait à Londres quand il faut changer quelque chose à la vie de la Jarretière41. Faut-il préciser que Louis XVIII et Charles Χ sur leur trône, furent incapables de modifier les statuts de Saint-Esprit ?42
Il suffirait cependant de pas grand chose pour que tout évolue régulièrement à Madrid. Dans cette attente, l’ordre autrichien, catholique et nobiliaire, semble aux yeux de tous, et à tort, un vrai successeur de l’ordre bourguignon.
NOTES DE BAS DE PAGES
1 - Les ordonnances de l’ordre de la Toison d’or. Vienne, 1914. Imprimerie impériale et royale de la Cour et de l’Etat : 10 et 79 p. sur grand papier, plus 2 planches de gravures sur cuivre venant de l'édition de 1626 et représentant les insignes de l'ordre et les armoiries de Philippe IV d’ Espagne.
2 - Cette formule usurpée par le duc de Bourgogne et le duc de Bretagne au XVe siècle, resta au Bourguignon après la paix d'Arras en 1435. On sait que Charles le Téméraire faillit devenir roi dans le Saint-Empire !
3 - Le comté palatin de Bourgogne est la Franche-Comté, alors du Saint Empire.
4 - Isabelle était une Capétienne comme fille du roi de Portugal Jean 1er, ancien maître de l’ordre d'Avis. Elle était ainsi la sœur d’Henri le Navigateur, duc de Viseu, du saint infant Ferdinand, etc.
5 - On dirait article de nos jours. N’oublions pas les capitulaires carolingiens composés de chapitres.
6 - Père Anselme de la Vierge Marie, etc., Histoire généalogique et chronologique de la maison royale de France, des pairs, grands officiers de la couronne & de la maison du Roy... , 3e éd., Paris 1726, t. 2, ρ. 524-526 (premier acte où Jean ΙΙ le Bon rappelle le courage de son fils Philippe à la bataille de Poitiers) et 526-527 (acte de Charles V publiant le précédent). On constatera p. 525 D et Ε, p. 526 Ε que la filiation par mâles est absente. D'ailleurs Jean ΙΙ le Bon n'avait pu être maître du duché qu'en étant un des héritiers par voie féminine. Notre roi était en effet fils de Jeanne de Bourgogne sœur du duc Eudes IV, grand-père du duc Philippe de Rouvres mort en 1361 sans postérité. Sur le statut de la Bourgogne: Jean Faussemagne, L'apanage ducal (sic) de Bourgogne, Lyon, 1937 (le vrai héritier féodal en 1361 aurait été Charles ΙΙ d'Evreux, roi de Navarre et non Jean II le Bon, mais on sait comment le roi arrangea la chose) ; Jean Richard, Les ducs de Bourgogne et la formation du duché du XIe au ΧIVe siècle, Paris, 1954, p. 10, 113, 115; Ferdinand Lot, Robert Fawtier, Histoire des institutions françaises au moyen-âge, t. 2, Institutions royales, Paris, 1958, p. 123, 126-127. On se demande comment Raoul de Warren, Les pairs de France sous l’ancien régime, Paris, 1958, t. 1, (« Les cahiers nobles » 15), a pu se tromper si gravement dans sa notice sur le duché pairie de Bourgogne.
7 - Jourdan, Decrusy, Isambert, Recueil général des anciennes lois françaises, t. 20, p. 565-569.
8 - Père Anselme, Histoire, p. 537-540 : l’un des pires crimes de Charles de Bourgognes fut l'installation d'une cour souveraine à Malines (donc en Saint Empire !) où tous les sujets du duc, même Français, pouvaient venir faire appel, alors que ces derniers ressortissaient, comme le duc, du parlement de Paris.
9 - Pierre de Bourdeille, seigneur de Brantôme, (Œuvres complètes, t. 5, Grands capitaines françois, couronnels françois Paris, 1869, p. 109.
10 - Bibl. nat., Manuscrits, Clairambaυlt 1312, consacré à la Toison d'or. Ρ. 177 : dès 1668 des imprimés sur les conquêtes de Lοuis XIV en Flandre, en Franche-Comté, etc. « Son conquérant est plus grand que Jason ... » Un dessin montre l'insigne de la Toison d'or percé d'une épée haute à fusée fleurdelisée ; Claude-Oronce Finé de Brianville, aumônier du Roi célèbre en héraldique ( + 1675), Symbole héroïque pour les dernieres conquestes du Roy, Paris, 1668. Ρ. 319-329 : Mémoire dressé en février· 1680 pour savoir si le Roy en qualité de duc de Bourgogne deuoit prendre le titre de chef et souverain de l’ordre de la Toison d’or. Α l’Ille (Lille) en février et mars 1680: les arguments ne sont pas toujours bons ! Ρ. 331-333 : Lettre escrite a Lille le 15 avril 1680 au sujet de la question de savoir si le Roy en qualité de Duc de Bourgogne deuoit prendre l’ordre de la Toison, lettre devant avoir pour auteur un certain Godefroy, garde des livres de la chambre des comptes de l'Ille (Lille), donc l’archiviste de cette institution, et il semble bien que le premier texte soit le reflet des préoccupations du président Errembault (de cette chambre ?) étant alors à la suite de la cour- (du Roi) qui fit une intrigue pour Louis XIV prenne la Toison. L'intendant local avait été mis au courant et montra immédiatement les inconvénients de la chose. La cour adopta le mémoire de l'intendant et méprisa l'avis bizarre du président qui fut imprimé dans la Gazette de Hollande, ce qui alarma la cour d'Espagne. Il est évident que l'acquisition de la Flandre ou de la Franche-Comté ne pouvaient en rien légitimer la prise de la Toison d’or. Dans le même sens est la thèse autrichienne selon laquelle la possession des Pays-Bas catholiques légitimerait la grande maîtrise dans la maison d'Autriche après 1700 ! Thèse développée après 1918 par la Belgique qui réclama le trésor à l’Autriche !
11 – Le roi d'Espagne était ennuyé du fait des renonciations de sa sœur ainée et de sa tante ainée, les reines de France Marie-Thérèse et Anne, femmes de Louis XIV et Louis ΧΙΙΙ, d'où sa lettre au pape avant de faire son testament (Madrid, 12 juin 1700). Innocent ΧΙI répondit qu'il pouvait laisser l'entière monarchie au deuxième fils du dauphin de France (sous-entendu que l'aîné aurait la France et que les deux monarchies ne seraient point unies Rome, 6 juillet · prince Sixte de Bourbon de Parme, Le traité d’Utrecht et les lois fondamentales du Royaume, Paris, 1914, ρ. 277-279).
12 - J. du Mont, baron de Carels-Croon, Corps universel diplomatique du droit des gens, Amsterdam, La Haye, 1731. t. 8, 1ère partie, ρ. 133-134, n° XLII.
13 - Charles VI - III en Espagne, prit la qualité de chef souverain de la Toison d'οr le jour de son couronnement, 22 décembre 1711 et nomma des chevaliers dès le 9 janvier 1712 : Trésors de la Toison d’or; catalogue de l'exposition du Palais des beaux-arts de Bruxelles, Bruxelles, 1987, ρ. 140. Ce bel ouvrage qui présente aussi la thèse espagnole, est à la gloire de la maison d'Autriche et de « S.A.R.I. l'archiduc Otto de Habsbourg » (il n'y a jamais eu d'archiduché de Habsbourg, ce fief étant un comté qualifié de comte princier en Autriche !) qui signe la • Préface du Souverain de l’ordre de la Toison d'Or" p. 15 : • Dr. Otto von Habsbourg ", alors qu'il est Othon d’Autriche sur les documents de l'ordre. On se perd dans ces tortuosités..
14 - Malgré le fameux traité de Madrid (1526) Charles Quint ne put récupérer la Bourgogne et il dut se résigner à son abandon, tout en gardant le titre ducal par traités de Cambrai (1529) et de Crépy (1544). Sur tout ceci : abbé Eugène Jarry, Provinces et pays de France. Essai de géographie historique, t. 3, fascicule 2 Monographie (Bourgogne), Paris, 1948, ρ. 379-384. Ce ne pouvait être qu’un crève-cœur pour Charles Quint qui voulait être inhumé dans l'église des Chartreux-les-Dijon, qui se pensait chef de la maison de Bourgogne, le duché étant « son ancien héritage, fondement de son ordre (la Toison d'or) et dont il portait le nom et les armes » ; il avait d’ailleurs un héraut nommé Bourgogne. Cf. ρ. 379-380 citant l’œuvre d'H. Hauser, Le traité de Madrid et la cession de la Bourgogne en 1525-1526, Paris, 1912, ρ. 21. ΙΙ n'était donc point question du Cercle de Bourgogne (invention de Maximilien 1er en 1512, cette circonscription judiciaire et militaire - il y en avait dix en Germanie - comprenait la Franche-Comté, la Flandre, la Hollande et l'actuelle Belgique), ou encore de Pays-Bas et encore moins de la "Belgique ", berceau de l'Ordre • (Dr. Otto von Habsburg, Trésors de la Toison d’or ρ. 15), Luc Hommel (L'histoire du noble ordre de la Toison d’or, Bruxelles, 1947) ayant rappelé et soutenu la thèse belge selon laquelle l'ordre était une institution politique et un ordre national des Pays-Bas.
15 - Pce S. de Bourbon de Parme, Le traité d’Utrecht, ρ. 344: dans le procès-verbal de la séance, du parlement enregistrant les lettres de renonciation de Philippe V, la cour déclara qu’elle les enregistrait (elle enregistrait tout et son contraire !) • sans approbation des titres de Roy de Navarre, de duc de Bourgogne et autres qui peuvent estre contraires aux droits du Roy •.
16 - Bibl. nat., Manuscrits, Clairambault 1241, p. 841 etc. : Louis XIV donne le collier de la Toison d'or aux ducs de Berry et d'Orléans par délégation de Philippe V, qui ne donne pas le titre de roi de Navarre à son grand-père ; aussi Clairambault 1312, ρ. 180, etc. (cérémonie du 7 août 1701 pour les deux) et ρ. 567, procès-verbal du don par le dauphin, commis à cet effet par « le Roi catholique » du collier de la Toison d’or au duc d'Orléans (9 décembre 1752). Arch. nat. ΚΚ 1432 : réception dans l'ordre du comte de Provence par délégation du « Roy d'Espagne » (2 août 1767) ibidem, Μ 63 pour la réception de Français au XVIIIe siècle ; ibidem, Ο3 525 : cérémonial de réception dans le même ordre du duc de Berry le 24 septembre 1815, Louis XVIII agissant au nom du « Roi catholique »·
17 -Julian de Pinedo y Salazar, Historia de la insigne orden del Toyson de oro, dedicada al Rey nuestro senor, xefe soberano, y gran maestre de elle..., Madrid, 1787, t. 2, ρ. 529.
18 - Ibidem, p. 20 pour l'acte espagnol ; Frid. Aug. Guil. de Wenck, Codex iuris gentium recentissimi ..., Leipzig, 1788, t. 2, p. 313-314 art. ΧΙΙΙ des préliminaires d'Aix (30 avril 1748), p. 421-422 protestation de Soto Mayor (20 novembre), ρ. 422-423 contre-protestation de Kaunitz-Rittberg (le 26 suivant). Par traités des 2 août 1718 (quadruple alliance) et 30 avril 1725, Philippe V et Charles VI se mirent d'accord pour renoncer à leurs possessions perdues.
19 - F.A.G. de Wenck, Codex, 1781, t. 1, p. 56 pour l’art. 6: S.A.R. François avait le droit de conserver, ainsi que sa descendance, les titres et armes de Lorraine et de Βar, sans que cela puisse préjudicier aux droits du Roi très chrétien. L'actuel chef de la maison d'Autriche a utilisé le titre de duc de Bar comme titre d'incognito et a utilisé duc de Lorraine à Nancy lors de son mariage civil en 1951 : il en avait donc pleinement le droit.
20 - Julian Cortes-Cavanillas, Alfonso ΧΙΙΙ, Barcelone, 1966, ρ. 250-254.
21 - Alfonso de Ceballos-Escalera y Gila, marquis de la Floresta, officier d'armes de Castille et Léon Panorama historico de Ιa insigne orden. Del Toisόn. de οrο, Madrid, 1994, ρ. 19 parle de « la presunta concesiόn., en. 1938, a favor· de Su Majestad reinante », et il est vrai qu'on a avancé plusieurs dates pour cet acte. (Henri-Charles) comte Zeininger de Borja, « L'ordre de la Toison d’or », Rivista araldica, Rome, 1950, ρ. 58: « Depuis 1931, il n'y eut qu’une seule nouvelle nomination, celle du prince des Asturies que nous obtînmes, le 28 juin 1941, du comte de Barcelone, alors à Lausanne » Cet auteur fut au service d'Alphonse ΧΙΙΙ et essaya de le continuer avec son fils cadet, sans succès pour Annuaire de la maison de Bourbon.
22 - Selon l'Etat espagnol, l’ordre est légalement aboli depuis 1931 ! Mis de la Floresta Ibidem, ρ. 20.
23 - Les Espagnols disent souvent que c'est du bourguignon !
24 - Beaucoup de renseignements dans la deuxième grande histoire de l’ordre en espagnol : Benito Vicens y Gil de Tejada, « La Toison de oro » dans l'immense œuvre de plusieurs auteurs, Historia de las ordenes de caballeria y de las condecoraciones espanolas..., Madrid, 1864, t. 1 (il y a deux tomes grands in-folios), ρ. 433-683. Cf. ρ. 675 et la suite pour « Elisabeth ».
25 - Photographie de l'acte d'Alphonse ΧΙΙΙ pour le duc de Connaught en 1903 : Stephen Patterson, Décorations et ordres de chevalerie de la collection royale britannique. The royal collection, château de Windsor, exposition à la Fondation Mona Bismark, Ρaris, 1996, ρ. 44.
26 - Photographie de l'acte du comte de Barcelone pour S.A.R. le duc de Calabre en 1964 : Guy Stair Sainty, The orders of chivalry and merit of the Bourbon Two Siciles dynasty, Madrid, 1989, ρ. 194.
27 - On donne au décoré une ampliation du décret avec une lettre du chef de la Maison de S.M. le roi d'Espagne. Sur les hésitations dans les actes : marquis de Floresta, Panorama, ρ. 20-21.
28 - Cf. l'œuvre de Β. Vicens y Gil de Tejada (n. 24). Le sceau porte l’écu aux grandes armes avec couronne royale et collier, l'écu placé sur le sautoir écoté de Bourgogne, la légende en latin donnant le nom et les principaux titres du souverain ; le contre-sceau montre l'écu de Philippe le Bon, le heaume de profil avec une fleur de lis comme cimier et des lambrequins, le collier et deux lions comme supports ; la légende en latin déclare avec beaucoup d'abréviations que c'est le sceau de l'ordre de la Toison d’or pour Philippe premier, son fondateur, et par la grâce de Dieu duc de Bourgogne, etc. La photographie du document montré dans le catalogue de S. Patterson (n. 25) indique un sceau en papier gaufré, ou sceau en placard.
29 - Les diverses éditions de l’Etat présent de la maison de Bourbon donnent la liste des chevaliers. Hors S.M. le roi d'Espagne, le doyen de l'ordre est actuellement S.A.R. le duc de Calabre, infant d'Espagne, chef de la famille des Deux-Siciles, nommé en 1964.
30 - S. Patterson, Décorations, ρ. 88 : « Jusqu'en 1946, la Jarretière demeura, comme le Chardon, l'affaire du gouvernement, qui remettait ces distinctions et en avisait le souverain. Leur octroi est alors redevenu un geste personnel de la royauté, ce qui les dépouille d'une dimension politique importante et leur redonne leur vocation première de récompense et de distinction honorifique royale ». Selon Μ. S. Patterson il s'est agi d'un « private arrangement between King George VI and the Prime Minister » (lettre à l’auteur, 12 avril 1996).
31 - Les quatre officiers étaient le chancelier, le trésorier, le greffier et le roi d'armes nommé Toison d'or (ch. ΧΙΧ des statuts). En 1930 il y avait un greffier roi d'armes (secrétaire général du ministère des affaires étrangères avec rang d'ambassadeur de S.M.C.), un chancelier (prêtre, recteur administrateur d'un hôpital, curé du palais royal) et un trésorier (Guia oficial de Espana, Madrid, 1930, p. 218).
32 – Trésors de la Toison d’or p. 148 : l’investiture des chevaliers à la Hofburg de Vienne le 5 décembre 1852 fut la dernière cérémonie publique ; le costume de l’ordre était alors abandonné. (Α ce sujet, ce beau livre d'inspiration autrichienne donne de navrantes traductions de l'allemand, ainsi « ornat » pour costume ou manteau », « dauphin » pour archiduc héritier...). L'empereur roi François-Joseph 1er fut représenté avec le costume de l'ordre en 1868 (ίbidem, p. 94), quatre plaques d’ordres autrichiens et hongrois étant mises sur le manteau orné du collier de la Toison d'or. Ce costume mettait ainsi le souverain en dehors de toute prédominance d'un de ses Etats sur les autres.
33 - Charles de Terlinden, Der Οrden υοm Golden Vlies, Vienne, Munich, 1970 ; publication du Kunsthistorisches Museum Wien par plusieurs auteurs, Weltliche und Geistliche Schatzkammer. Bildführer, Vienne, 1987.
34 - Il est à remarquer que l'acte du souverain est sous forme de lettre patente, parchemin plat, et non sous forme de cahier habituel pour les diplômes de titres dans le Saint Empire, l'Autriche, etc. J'ai vu plusieurs lettres patentes de ce genre signées par François-Joseph I°'. Une d'elles a été publiée dans Roman Freiherr (baron) νοn Prochazka, Österreichisches Ordensbandbuch, Munich, 1ère éd., 1974, pl. XV et pl. VIII pour le sceau. L'empereur roi utilisait aussi un sceau en papier gaufré ou sceau en placard pour les lettres annonçant la nomination et on y voit les armoiries de Philippe le Bon (photocopie d'une lettre donnée par mon feu ami Ottfried Neubecker).
35 - Ce tiercé en pal qui fut celui de notre impératrice Marie-Louise, fut inventé le 6 octobre 1806 par François II ayant abandonné l'Empire allemand (en réalité le Saint Empire et les titres d’empereur élu des Romains, roi de Germanie) et restant François 1er empereur d'Autriche Otto Posse, Die Siegel der deutschen Kaiser und Könige..., t. 5 Das Siegelwesen der deutscben Kaiser un Könige von 751 bis 1913, Dresde, 1913, p. 258.
36 – Trésors de la Toison d’or, p. 15.
37 - Otto de Habsbourg-Lorraine, L'idée impériale. Histoire et avenir d’un ordre suprational, Nancy, 1989, ouvrage orné sur la couverture de la couronne octogone de Vienne. Ρ. 65-68: « Des symboles pour un Empire et de l’Europe » texte qui disserte sur les symboles du Saint Empire et de l'Europe, en toute continuité, et l'on apprend ceci de ce prince : « Ce n'est que dans la deuxième moitié des années 80 que nous » (le prince). « avons pu introduire, au bout d’un combat d’usure contre ces dernières résistances nationalistes, le passeport européen rouge comme la couleur de la Bourgogne, ainsi que le permis de conduire correspondant ». Aveu d'intérêt de la part du « chef souverain » d'un ordre « bourguignon ».
38 - Le feu baron Geza Kόvess de Kόvesshaza, greffier de l'ordre, m'a souvent communiqué des listes et annonces de celui-ci, mais le chancelier m'a refusé la liste de ses membres en 1988, celle-ci étant considérée comme confidentielle (c'était alors Georges comte de Nostitz-Rieneck). Une liste a été publiée en anglais et les chevaliers groupés par famille : Guy Stair Sainty, « The most illustrious order of the Golden fleece », Nobilta, Milan, Bologne, Monferrato, 1995, 11° 8, ρ. 374. Il faut supprimer Robert archiduc d'Autriche-Este mort depuis (le titre passé à son fils aîné, Lorenz, prince de Belgique par mariage) et Albrecht duc de Bavière aussi décédé. Il y a cinq chefs de maisons royales privées de leurs couronnes et le grand maître de l’ordre de Saint-Jean dit de Malte. Officiellement l’ordre autrichien est « illustre » (en espagnol insigne), et non point très illustre comme l’écrit G. S. Sainty.
39 - Le deuxième Capétien a être fait chevalier de la Toison autrichienne fut Elie prince de Bourbon Parme (futur duc de Parme) en 1907 : il était l’époux d'une archiduchesse depuis 1903.
40 - (Charles) vicomte Terlinden, « L’ordre de la Toison d’or », Archivum heraldicum, 1956, n°4, p. 51 : le 16 septembre 1953, le conseil des ministres de la République fédérale d'Autriche faisant savoir à S.A.S. le duc de Hohenberg (sans doute point qualifié ainsi !), chancelier chancelier intérimaire, sa décision du 8 (manifestée sous forme de décret selon certains) de reconnaitre celui-ci comme « personne juridique de droit international et déclarant que tous ses biens étaient placés sous la protection du gouvernement fédéral. Le ministre de l'instruction publique, autorité de tutelle des beaux-arts, était chargé de conclure un accord pour la conservation des biens. Cet accord avec l’ordre (qualifié parfois de traité de dépôt) fut signé le 25 novembre suivant. Du même vicomte Terlinden, chevalier de l’ordre qui accommode l’histoire à la sauce autrichienne, Der Orden υοm Goldenen Vlies, p. 20 où il mentionne le décret du 8 septembre 1958 ; du même « Coup d'œil sur l’histoire de l’ordre illustre de la Toison d’or, catalogue de l'exposition de Bruges, Bruges, 1962, p. 28, 32 ; la liste des chevaliers de l’ordre, dans les deux branches à partir de 1700, fut établie par mon feu ami le comte Thierry de Limburg Stirum, lui aussi chevalier de l'ordre autrichien. C'est sur cette reconnaissance d'un ordre indépendant de l'Etat autrichien, donc purement dynastique, que des chevaliers français se sont fait reconnaitre le droit de porter « la croix de l'ordre de la Toison d’or » par le grand chancelier de l'ordre national de la Légion d'honneur, ordre qui est conféré par « Son Altesse impériale l’archiduc Othon de Habsbourg »..
41 - Ainsi, S.M. la reine du Royaume-Uni a changé les statuts de la Jarretière quand elle y a admise des dames britanniques de sang non royal, comme une duchesse de Norfolk, et, depuis peu, la baronne Thatcher.
42 - Sous la Restauration, des chevaliers du Saint-Esprit prêtaient serment de respecter des statuts qu'ils ignoraient totalement, le texte en question n'étant pas distribué et restant inconnu du public. D'où des plaintes, alors même que ces statuts étaient largement désuets et même totalement dépassés pour les preuves de catholicité et de noblesse (on ne nomma cependant que des chrétiens). Cf. Musée national de la Légion d'honneur et des ordres de chevalerie, Archives Tiolier, Saint-Esprit VII, 7 : parmi les chevaliers du Saint-Esprit se plaignant il y avait un maréchal de France et il y avait aussi des chevaliers de Saint-Michel dans le désarroi pour le même motif. Les statuts du Saint-Esprit avaient été réimprimés pour la dernière fois en 1788 et on avait le projet de recommencer en 1829, ce qui ne fut pas fait.