Un Double Dragon au musée de la Légion d’honneur
(traduction du texte original en anglais)
Professeur Gustav A. Tammann
Le musée a reçu un insigne exceptionnellement beau avec sa double boîte - l’ordre chinois du Double Dragon, type I, 3e classe, 3e grade ; d’une taille réduite, à porter en cravate, il est en or et
décoré de plumes de Martin-pêcheur. D’après le diplôme qui l’accompagne, ainsi que sa traduction officielle en français, l’ordre fut conféré à «Lei-cheng, Directeur des Etablissements de la
Buire en France» le 13 mars 1889. Derrière ce nom chinois se tient un français qui s’appelle réellement Augustin Seguin(1) (1841-1904), ingénieur qui avait réalisé un petit chemin de fer dans
le jardin du Palais d’été à Pékin pour le compte de l’empereur de Chine. La description suivante pourra nous faire mieux apprécier ce don de très grande valeur.
1. Introduction
La Chine impériale était dotée d’un système de récompenses particulier: de « vestes jaune d’équitation », de litières, de plumes de paon arborées d’un œil à trois yeux, de plumes de corbeau, de
titres de noblesse et de grades dans la hiérarchie des mandarins, ainsi que d’un certain nombre de privilèges, comme, par exemple, faire son entrée dans la Cité interdite à cheval. Hormis les cadeaux
matériels, ces signes de la grâce impériale avaient peu de signification pour le nombre grandissant d’européens en Chine. Il fut ressenti un besoin d’honneurs que pouvaient apprécier les
étrangers.
La première distinction exclusivement pour les soldats étrangers connue en Occident sous le nom de « ordre du Dragon » fut autorisée par le Régent, le très cultivé et sophistiqué Prince Kong, le 16
novembre 1862. C’était une médaille en or ou en argent percée au centre d’une ouverture carrée suspendue à un support proche de celui de la médaille de Crimée britannique. La médaille fut conférée
pour la défense réussie de Shanghai durant l’insurrection des Taï-Pings. Seulement une quarantaine de médailles en or et une centaine en argent furent remises, principalement aux officiers et hommes
de troupes français. Puisque la médaille fut conférée sans certificat, il s’est répandu l’opinion erronée que tous les Français ayant aidé les troupes impériales avaient droit à la médaille. La
plupart des médailles existantes ont été fabriquées par des maisons parisiennes spécialisées en décorations.
L’ordre du Dragon fut suivi par ce qui est maintenant généralement connu comme « l’ordre du Bouton ». Il fut consacré par l’empereur après la victoire de Soochow par les forces impériales sur les
Taï-Pings en novembre 1863. Conférée principalement aux officiers et soldats britanniques de la « Ever Victorious Army » (l’armée toujours victorieuse), la décoration était en or et argent,
sous-divisée en classes désignées par la couleur de la pierre centrale : rouge comme le corail, bleu comme le saphir et blanche comme la pierre de lune. L’échelon des couleurs et pierres précieuses
suivait l’ancienne hiérarchie des boutons mandarins. L’ordre du Bouton Rouge en or ne fut conféré à Sir Robert Hart, inspecteur général du Service Impérial de Douane Maritime de Chine, qu’en
1881.
2. La Création de l’ordre du Double Dragon
Bien que d’autres médailles commémoratives aient ensuite été créées, l’absence d’ordre institué sur le modèle européen devint une préoccupation croissante. Les premières démarches pour remédier à
cette situation furent entamées par Sir Robert Hart en 1870. Il était alors un des européens les plus influents en Chine. Il a fait faire des spécimens du nouvel insigne à Paris par
François-Hyppolite Lemaitre. Il pouvait éventuellement compter sur le soutien de Li Hung-chang, qui prenait de plus en plus de pouvoir. Le nouvel ordre devait s’appeler Shuan Lung Pao-hsing (l’Etoile
de l’ordre du Double Dragon, dorénavant abrégé ODD). Le Tsong-li Yamen , correspondant à peu près au ministère des Affaires Etrangères, devait rédiger les premiers statuts. Ces derniers ont été
approuvés par le Régent et par Ts’u-hsi, une seconde concubine devenue impératrice douairière aux pouvoirs illimités le 7 février 1882. Les statuts furent imprimés à Paris en français avec des
illustrations couleurs en pleine page ; on ne connait pas de version imprimée en chinois. Une traduction allemande, officielle mais écrite à la main, se trouve au Haus-Hof-und Staats-Archiv à Vienne
(sign. F46-Akten 298-34) ; elle diffère du texte français sur quelques points de détail.
Le 17 avril 1882, Robert Hart écrit à un ami : « L’ordre chinois du Double Dragon vient d’être établi par décret impérial ! J’en parle depuis douze ans et y ai mis les touches finales il y a quelques
mois. Que ne faut-il pas comme temps pour faire passer quelque chose dans ce sacré pays ! »
L’ODD comprend cinq grades, les trois premiers sont divisés chacun en 3 classes. Pour faire court, ils sont ici désignés de ODD 1-1, 1-2, 1-3, 2-1 . . . à ODD 5. L’ODD 1-1 fut réservé aux souverains
seulement, l’ODD 1-2 aux princes héritiers présomptifs, princes du sang et membres des familles souveraines, l’ODD 1-3 aux grands-dignitaires de la noblesse, ministres dirigeants et ambassadeurs, et
l’ODD 2-1 aux envoyés extraordinaires et ministres plénipotentiaires . . . ainsi de suite jusqu’au ODD 5, qui fut réservé aux industriels et négociants (le texte en italique est cité directement des
statuts français). L’ODD 3-3, qui présente pour nous un intérêt particulier, fut réservé officiellement aux interprètes, majors et capitaines. La traduction allemande des statuts ajoute que les
fonctions prescrites pour l’ODD 1-3 et pour les grades en dessous n’était donnée qu’à titre indicatif. L’ordre fut réservé aux étrangers jusqu’en 1908, date à laquelle il a été ouvert aux Chinois.
3. L’insigne
Les insignes de la 1re classe étaient rectangulaires, peut-être pour rappeler la boucle de ceinture des hauts mandarins ; les insignes des classes en dessous étant ronds ou ovales et le dessin
suivait, pour des raisons inconnues, les miroirs métalliques de la période Tang (618 – 907 A.D.). La représentation des deux dragons proéminents est très détaillée pour l’ODD 1-1 mais se simplifie au
fur et à mesure qu’on descend dans la hiérarchie de l’ordre. Il est intéressant de noter que même dans la classe ODD 1-1 les dragons n’ont que quatre griffes ; les dragons à cinq griffes ont été
réservés pour les objets appartenant à l’Empereur. Entre les deux dragons figure une pierre (en réalité du verre) : une perle pour l’ODD 1-1, un rubis pour l’ODD 1-2, un corail poli pour l’ODD
1-3, un corail gravé pour les trois grades de l’ODD 2, un saphir pour l’ODD 3 et 4 et une pierre de lune pour l’ODD 5. L’inscription « donnée par l’empereur de la Grand Dynastie des Tsing » se trouve
le long de l’axe vertical de l’insigne ainsi que la classe de la distinction, mais en caractères Manchu qui sont aujourd’hui presque illisibles pour la plupart.
Sur le pourtour, on peut lire en écriture « normale » Han : « Conféré impérialement Shuan Lund Pao-hsing ». Les deux premiers mots sont absents sur les ODD 1-1 et 1-2 car l’adjectif « conféré » avait
été évidemment considéré comme inapproprié pour les récipiendaires des rangs les plus élevés. A l’origine, les insignes furent fabriqués dans un alliage de basse qualité appelé « électrum », de
l’argent avec une très petite quantité d’or, comme il était courant pour les pièces chinoises. Les insignes ont donc été fabriqués en Chine mais ils ne sont pas poinçonnés.
Ils se portaient autour du cou, suspendus à de larges rubans brodés en soie. Les couleurs des dragons et des ornements brodés étaient précisément définis pour chaque classe.
Ainsi, le ruban de l’ODD 3-3 devait obligatoirement comporter une broderie rouge sur un fond bleu.
Les insignes et leurs rubans se rangeaient dans deux étuis séparés en bois couverts de soie avec une fenêtre en verre dessus. Ces premiers étuis sont aujourd’hui excessivement rares. Dans le cas de
notre récipiendaire, les deux étuis se rangeaient dans une grande boîte en bois (17.3 x 12 x 11 cm) gravée avec l’inscription « Shuan Lung Pao-hsing » ; cette boîte de rangement est la seule qui nous
soit parvenue à ce jour.
Les insignes de l’ODD 1-1 et 1-2 devaient être envoyés par le Tsong’li Yamen au ministre des Affaires Etrangères du pays du récipiendaire, qui était chargé de les lui délivrer. Pour les autres
catégories, les insignes étaient envoyés avec un diplôme d’environ 42.5 x 57 cm portant le seau du Tsong’li Yamen. Le diplôme comporte un numéro matricule qui suit l’ordre chronologique des
attributions quels que soient la classe ou le grade. A la fin du XIXe siècle, plus ou moins 1000 ODD avaient été attribués. Le diplôme de Lei-cheng porte le numéro 181. Durant les sept premières
années de son existence, c’est à dire de 1882 à 1889, l’ODD n’a donc été conféré en moyenne que 26 fois par an.
Les premiers insignes de l’ODD sont très recherchés par les collectionneurs. Les insignes de l’ODD 1-1 et 1-2 sont de la plus extrême rareté. Parfois, on trouve des ODD 1-3 mais la plupart ont été
fabriqués en format réduit – comme beaucoup des ODD 2-2 – par la firme F.R. Rothe à Vienne après la deuxième guerre mondiale. Les plaques contemporaines de l’ODD 2 et 3 sont relativement fréquentes ;
les ODD 4 sont rares et les ODD 5 encore plus. Mais l’enchère record de 100.000 $US prononcée à Hong Kong en 2009 a néanmoins surpris.
4. La Distribution de l’ordre du Double Dragon
On l’a vu précédemment, pouvaient prétendre recevoir l’ODD les membres du corps diplomatique en Chine, des industriels étrangers venant en Chine, des ingénieurs y travaillant et la presque totalité
des 300 européens employés par le gouvernement chinois. L’ordre s’est fait connaître en occident à la suite du tour du monde de Li Hung-chang en 1896. Cette année là, Li fut nommé à 73 ans Envoyé
extraordinaire et Ministre plénipotentiaire pour assister au couronnement de Nicolas II à Moscou. Après cette cérémonie, il voyagea à Berlin, La Haye, Bruxelles puis Paris où il arriva le 14 juillet.
Le Président Félix Faure organisa un dîner officiel en son honneur et lui remit vraisemblablement la grand-croix de la Légion d’honneur. Il serait intéressant de savoir si Li lui a offert l’ODD
en retour et si oui, dans la classe des souverains ? Le tour du monde se poursuivit à Londres, New York, Toronto et Vancouver ; Li fut de retour à Tien-tsin en octobre. Bien qu’il ait été reçu
royalement partout, il a été considéré en occident comme un homme froid et les Etats ont été déçus qu’il n’ait pas passé de grandes commandes aux industriels. De son côté, Li fut déçu par le manque
de dignité de ses partenaires. Pendant son tour du monde, Li a distribué l’ODD à plusieurs centaines de personnes, en plus de sa propre médaille en argent avec son nom. Rien qu’en Prusse, il a décoré
155 personnes lors de sa visite. Il faut ajouter qu’il a distribué l’ODD 3-1 en deux sous-classes : 3-1a et 3-1b. Alors que la deuxième comprenait la plaque habituelle en cravate, la première se
présentait comme une petite étoile allongée à quatre pointes à porter sur la poitrine. Cette étoile n’a été donnée que dans quelques circonstances exceptionnelles et est assez rare
aujourd’hui.
5. Les variantes de l’insigne
Comme les statuts sont accompagnés d’illustrations, on pourrait s’attendre à ne rencontrer que des insignes très similaires. C’est le contraire, et pour deux raisons.
La première, c’est que si les Chinois avaient pour objectif de satisfaire l’envie des étrangers de recevoir des décorations à la mode occidentale, leur bonne volonté n’a pas rencontré d’écho
favorable. On a pensé qu’ils cherchaient à se débarrasser des occidentaux avec ce qu’ils considéraient pour eux-mêmes comme de la camelote. Des étrangers ont critiqué l’ODD, faisant valoir qu’un
insigne porté au cou ne pourrait jamais représenter un ordre distingué. Dés 1883, cela a conduit les chinois à introduire de nouveaux insignes pour les plus hautes classes, à savoir des ceintures
admirablement brodées. A cause de leur taille, on les appelait les « cloches à vaches », ce qui a déclenché la production de nombreux, quoique non statutaire, insignes de taille réduite (voir
ci-dessous). L’apparence terne de l’insigne fut critiquée également ; ils ont été fabriqués en or après 1894. La même année, parce que les européens se lamentaient de leur absence, des plaques de
poitrine furent introduites pour les classes les plus élevées de l’ODD. La situation de l’ordre a fait l’objet d’un rapport de Sir Robert Hart en 1894 intitulé « La Constitution, les règlements et
les insignes de l’Ordre du Double Dragon » qui a été publié dans le « Inspectorate General of Customs Circular No. 637 » ; mais la plus grande partie du texte est en chinois.
Une deuxième raison explique la pléthore de variétés d’insignes. D’après les statuts, le Tsong’li Yamen ne devait fournir les insignes qu’aux ODD 1-1 et 1-2. Pour les autres grades, l’insigne
devait être fourni par ceux qui étaient à l’origine de la proposition ; le Tsong’li Yamen ne délivrait que le diplôme. On ne sait pas précisément qui pouvait proposer des nominations, probablement
les plus hauts officiels de l’empire. Implicitement, on supposait que le proposant serait remboursé par le récipiendaire. Bien entendu, cette disposition statutaire a eu comme conséquence que de plus
en plus d’insignes non conformes ont été fabriqués. Li Hung-chang a eu largement recours à ces dispositions, sa fortune lui permettant d’agir plus que de raison. Il a commandé des insignes de plus
petite dimension, principalement à Bogdanov à Saint Petersbourg (poinçon M en cyrillique). Comme Bogdanov n’avait qu’une patente d’orfèvre pour le travail en argent, Li s’adressait à l’orfèvre A.A.
Treiden (poinçon AT) dans la même ville lorsqu’il avait besoin d’insignes en or. Aujourd’hui, on rencontre plus couramment les petites plaques de l’ODD que les insignes prescrits dans les statuts de
1882. Lorsqu’il proposait une personne dans l’ordre, Li était tout de même tenu d’adapter la classe et le grade dans l’ordre en fonction du rang du bénéficiaire.
Mais il contournait en partie cette contrainte en faisant faire des insignes d’un grade donné non pas seulement en argent mais aussi en or, suivant sa considération personnelle pour le récipiendaire ou le prix que ce dernier était prêt à payer. L’émail bleu de ses insignes les plus extravagants dans les trois classes de l’ODD 3 a été remplacé par des plumes de Martin-pêcheur.
L’insigne de Lei-cheng reproduit ci-dessus est un exemple typique des insignes fournies par Li Hung-chang. Il ne mesure que 75 x 48 mm, y compris l’attache, alors que le format standard est de 95 x 75 mm. Il n’est pas poinçonné. En or, avec ses plumes de Martin-pêcheur, cet insigne est une des plus belles fabrications que l’on puisse trouver pour cette classe de l’ODD 3-3 (n° inv 09706-09707 bis).
6. L’introduction d’un nouvel insigne de l’ordre du Double Dragon
Le 2 mars 1897, Hsü Ching-ch’eng, ministre à la Cour de Berlin écrit au Tsong’li Yamen que les insignes de l’ODD ne sont toujours pas bien acceptés à l’Ouest. Il inclut des projets de nouvelles
décorations et propose que les meilleurs artisans de Tien-tsin et Shanghai fassent les moules à fonte, suggérant ainsi que le nouvel insigne devrait être fondu et non pas frappé. Sa proposition fut
acceptée, ainsi qu’en témoigne la note détaillée qui a été publiée pour décrire les nouveaux insignes (Cf. Qing Chao Xu Wen Xian Tong Kao, p. 9297, i.e., The Study of Additional Documents and Records
of the Qing/Manchu Dynasty, écrit par Liu Jin-zao). L’empereur avait en effet approuvé le 11 février 1898 les nouveaux insignes de l’ODD ; mais leur fabrication fut retardée en raison des évènements
politiques. Pendant 100 jours, l’empereur Kwang-hsu introduisit de grandes réformes pro-occidentales, mais il dut faire face à l’hostilité de plus en plus ouvertement anti-occidentale de Ts’u-hsi.
Les Boxers, aux pouvoirs grandissants, se révoltèrent ouvertement contre les étrangers en 1900 ; leurs sympathisants Ts’u-hsi déclarèrent la guerre à tous les pouvoirs occidentaux le 21 juin 1900.
Jusqu’à ce que soit signé le traité de paix en septembre 1901, peu d’étrangers ont pu aspirer à l’ODD. Quand le prince impérial Ch’un est venu présenter ses excuses à Berlin le même mois pour
l’assassinat de l’envoyé spécial de l’empire germanique, le baron Clemens von Ketteler, il a fait faire en catastrophe des insignes de l’ODD de l’ancien modèle, quoique de moindre qualité et de
taille réduite, chez Godet & Sohn à Berlin. C’est bien la preuve, contrairement à ce qu’on peut lire, que le nouveau type II de l’insigne n’était pas prêt avant 1902.
Bien que le système des classes ait subsisté dans l’ODD, les insignes de type II étaient très différents et correspondaient mieux à ce que les occidentaux attendaient d’un ordre. Ils n’ont
pratiquement pas varié jusqu’à la fin de l’empire. Environ 4000 insignes de type II ont été distribués. L’ODD a été remplacé fin 1911 par un système d’ordres encore plus complexe comprenant l’ordre
du Trône et les ordres du Dragon Jaune, du Dragon Rouge, du Dragon Bleu et du Dragon Noir avec un total de 19 grades. Ces ordres ont eu une durée de vie courte; ils ont été abolis à leur tour à la
fin de la monarchie en février 1912 mais ils ont considérablement influencé les ordres républicains qui ont suivi.
Nous remercions M. King Kwok, de Hong Kong, qui partage notre intérêt pour les ordres chinois depuis de nombreuses années et à qui nous devons beaucoup de renseignements.
NDLR : Le musée expose un insigne similaire de l’ordre du Double Dragon distribué par Li Hung-chang. Il s’agit d’un dépôt de S.E. l’ambassadeur Antonio Spada. C’est un insigne de même type, classe et
grade que celui décrit par le professeur Tammann, mais non attribué.
Note
(1) Éléments de biographie rédigés par Régis Passot, arrière petit-fils d’Augustin Seguin : Seguin Augustin, né à l’Abbaye Cistercienne de
Fontenay (Côte d’Or) le 28 août 1841, décédé à Varagnes (Annonay) le 18 août 1904, ingénieur diplômé de l’École Centrale des Arts et Manufactures. Augustin Seguin, quatorzième enfant de Marc,
héritier de la propriété de Varagnes (Annonay) et des précieuses collections scientifiques qu’elle renferme, avait épousé le 20 septembre 1865 Félicie Mangini, fille de Lazare, auteur de très
importants travaux de chemin de fer. Il avait à peine vingt-cinq ans lorsque ses beaux-frères, Lucien et Félix Mangini, l’appelèrent à les seconder dans leurs entreprises des lignes ferroviaires du
Sud-Est et des Dombes. Il entra ensuite aux chantiers de la Buire où, pendant la guerre de 1870, il contribua de tout son pouvoir à la défense nationale, faisant établir avec la rapidité
qu’exigeaient les circonstances des équipages militaires, des batteries d’artillerie, et transformer d’énormes quantités de fusils. Après la conclusion de la paix, il s’attacha à reconstituer le
matériel des chemins de fer, à construire des machines motrices, métiers à tisser, etc. Dans les années 1885-1890, le gouvernement chinois, curieux des progrès occidentaux notamment en matière de
chemins de fer, demanda aux Ateliers de la Buire la réalisation d’une maquette de voie ferrée, locomotive, wagons et voitures. Cette maquette, qu’on peut penser avoir été réalisée à l’échelle de 1/3,
fut construite en France puis assemblée dans les jardins du Palais d’été ; les ministres chinois commanditaires la firent ensuite découvrir à l’empereur, ce qui donna un coup de pouce définitif au
développement du transport ferroviaire chinois. En reconnaissance de cette démonstration de technologie, Augustin Seguin reçut le Double Dragon.