Biographie et décorations de l'amiral Louis Édouard Bouët-Willaumez
Jean-Claude d’Ozouville, Jean-Christophe Palthey
La comtesse Bouët-Willaumez, en accord avec ses neveux, a fait récemment don au musée de la Légion d’honneur d’un important écrin contenant la quasi totalité de ses
décorations. A cette occasion, la Société a pensé utile de donner la parole à son descendant direct, Jean-Claude d’Ozouville, pour évoquer la carrière de l’un des plus grands marins du Second Empire.
Les notes techniques de bas de page sur les différentes décorations ont été aimablement rédigées par Jean-Christophe Palthey.
CONSILIO MANUQUE
Ces mots en forme de devise, qui furent traduits «par l’habileté et par la main» ou bien «par la réflexion et par l’action», constituent la devise
officielle de mon ancêtre, le vice-amiral Bouët-Willaumez, sénateur, grand-croix de la Légion d’honneur. Il en a hérité de son parent et père adoptif, le vice-amiral Willaumez, 1761-1845, pair de
France, grand-croix de la Légion d’honneur, commandeur de l’ordre de Saint-Louis.
Le résumé ci-après de la carrière de l’amiral comte Bouët-Willaumez montre à quel point ces mots «Consilio Manuque» firent partie du quotidien de cet officier qui, après avoir prouvé son
audacieuse et humaniste efficacité sur les côtes occidentales d’Afrique, devint l’un des principaux personnages de la marine française du Second Empire.
L’œuvre de Louis Édouard Bouët puis Bouët-Willaumez fut en effet capitale le long des côtes occidentales d’Afrique, jusqu’au Gabon. Notamment pour combattre la traite des Noirs et faire en sorte que
dans ce combat, la France soit - officiellement et concrètement - en égales forces navales que celles de l’Angleterre. Et cette œuvre fut aussi indispensable et capitale pour convaincre et agir de
sorte que peu à peu se substituent à la traite des Noirs la culture et la traite de marchandises dites «licites». Cet officier de marine n’hésitant pas à dire et écrire, haut et fort, ce qui le
scandalisait et à suggérer (sinon organiser de sa propre initiative) l’abolition définitive de la traite humaine et de l’esclavage.
Ce personnage, ex-gouverneur du Sénégal et dépendances, avait les plus grandes qualités: efficace et diplomate militaire, brillant et actif organisateur (entre autres lors de la guerre de Crimée),
sans cesse passionné par les nouvelles techniques modernes de son époque (locomotion par machine à vapeur et hélice, blindages, éperons, armements), inventeur de tactiques de batailles navales,
écrivain courageux et érudit, dynamique préfet maritime et commandant en chef d’escadre.
Pour terminer cette introduction, je citerai la lettre que, jeune lieutenant de vaisseau, il a adressée le 18 octobre 1839 à la Chambre de Commerce de Bordeaux qui l’avait gratifié d’une bourse de
jetons en remerciement de ses explorations africaines:
«Quelque flatteuse que soit la distinction dont vous m’honorez, il m’est impossible de l’accepter. Je m’étais exprimé à ce sujet aussi haut que possible, tant à bord qu’à Paris et j’avais espéré
ainsi m’éviter la démarche pénible que je fais avec regret, mais avec le sentiment d’une intime conviction. Cette conviction est que nous ne devons attendre de reconnaissance que du gouvernement qui
en a le dépôt dans les mains, que nous ne devons même pas paraître défendre et protéger les intérêts de telle ou telle fraction de la France, mais de la France toute entière».
- Né le 24 avril 1808 à Brest, fils de Jean Michel Alexandre Bouët, négociant, et de Marie Anne Lorans son épouse.
- Parent et fils adoptif (février et septembre 1845) du vice-amiral Jean Baptiste Philibert comte Willaumez (1761-1845), Pair de France. D’où, dès 1845 : Bouët-Willaumez.
- Époux (1845) d’Émilie Eugénie Le Marant de Kerdaniel (1822-1905), fille de René Constant Le Marant de Kerdaniel, vice-amiral, vice-président du conseil d’amirauté et de son épouse Eugénie Brunet (elle-même d’ascendance de l’Isle de France/île Maurice).
- Décédé le 9 septembre 1871 à Maisons-Laffitte.
Résumé de ses états de service
Collège de Vendôme, puis collège naval d’Angoulême dont, en 1824, il sort aspirant. Ses premières campagnes sont en Méditerranée, dans l’Océan Indien, à la bataille de Navarin (Grèce) (1827), à la
prise d’Alger (1830) et au blocus d’Anvers (1832). Il se passionne aussitôt pour la navigation à vapeur : ainsi étudia-t-il en 1834 la conception et le fonctionnement du Sphinx, le premier
bâtiment de guerre à vapeur français.
1836. Lieutenant de vaisseau, il commande l’aviso à vapeur l’Africain et remonte le fleuve Sénégal jusqu’aux chutes du Felou. Est alors fondé le comptoir de Médine. Des trois européens ayant
organisé et participé à cette expédition, Louis Édouard Bouët revient seul vivant : avant de décéder de la fièvre jaune, le gouverneur Malavois avait réclamé pour cet officier la croix de
chevalier de la Légion d’honneur, qui fut accordée le 30 mai 1837.
Du 4 décembre 1837 au 20 octobre 1840, il commande le brick canonnière la Malouine: pour une campagne d’exploration des côtes africaines depuis la Guinée jusqu’au Cap Lopez.
9 février 1839 : contracte avec le roi Denis un premier traité d’établissement français au Gabon. Louis Édouard Bouët est alors accompagné par un délégué de la Chambre de Commerce de Bordeaux, le capitaine au long cours Broquant, chargé d’étudier « les ressources commerciales du littoral africain ».
18 septembre 1839 : officier de la Légion d’honneur. Pour récompenser Louis Édouard Bouët qui, après pillage (par des autochtones du Golfe de Guinée)
de trois bâtiments de commerce français (2 de Bordeaux et 1 de Marseille) avait capturé les chefs de ces peuplades et les avait obligés à restituer (en or, ébène et ivoire) la valeur des objets
pillés. A propos de cette expédition, L. Capperon écrira (« La Revue Maritime », 1953, page 1086) : « Le rapport de Bouët-Willaumez sur cette croisière de 1838-1839 mérite de longs
extraits (…). Avant tout, la traite des esclaves retient son attention. Si l’Europe le veut, elle doit cesser définitivement
sur ces côtes et alors les autochtones exploiteront les produits de leur sol pour les échanger avec des produits d’Europe ».
En 1840, il relève le plan de Mogador (Maroc). Puis capitaine de corvette, il devient chef de la station navale des côtes d’Afrique et reçoit le commandement de la Triomphante puis du Nisus et de 5 bricks pour une nouvelle croisière le long des côtes occidentales d’Afrique. Quinze plans de rade seront levés.
Le 18 mars 1841, Louis Édouard Bouët signe, avec le roi Louis, un second traité d’établissement français au Gabon. Nécessité pour permettre aux navires de se ravitailler : « la rade du Gabon est le plus vaste et le plus bel abri que possède la France entre les tropiques ». (L. É. Bouët).
Du 6 février 1843 au 1er février 1844, il est gouverneur du Sénégal. Il crée de nouveaux comptoirs : Grand-Bassam, Assinie. Et au Sénégal, il esquissa plusieurs projets qu’ultérieurement Faidherbe concrétisa. Le Sénégal qu’il nomme non pas seulement « colonie » mais « colonie d’échanges ». Ainsi écrivait-il en 1847 : « Que la France, qui possède la plus riche colonie d’échanges de l’Afrique occidentale, doit donner au monde l’exemple d’une philanthropie éclairée, ne fût-ce qu’en expiation du passé ». D’Algérie il fait venir un peloton de spahis: lui-même cavalier, ce marin avait besoin d’une cavalerie légère pour tous terrains. Ces spahis furent les «ancêtres» de la Garde Rouge, l’actuelle Garde présidentielle de la République du Sénégal.
1843 sera, aussi, le démarrage d’une collaboration entre L.É. Bouët (puis Bouët-Willaumez) et le savant François Arago (✝1853), le futur ministre de la Marine et des Colonies du Gouvernement
provisoire de la IIe République, gouvernement issu des journées insurrectionnelles de février 1848. Comme je l’ai mentionné plus haut, depuis ses premiers pas dans la Marine, Louis Édouard fut
concrètement passionné par les débuts de l’application de la machine à vapeur sur les bateaux de la marine de guerre française, bateaux démontables ou navires plus importants. Et c’est ainsi qu’en
1847 François Arago autorisa L.É. Bouët-Willaumez à publier, dans un ouvrage à paraître, une longue notice (dont Arago était l’auteur, 1826) sur «les machines à vapeur».
Il faut aussi ajouter, car cela est rarement dit et écrit, qu’entre 1834 et 1850 (période de présence et d’actions de L.É. Bouët/Bouët-Willaumez le long des côtes africaines), l’exploration
minutieuse des côtes occidentales de l’Afrique, la lutte contre le trafic des esclaves et la traite des Noirs, les actions contre la piraterie pour faire respecter le pavillon français de nos navires
de commerce, contribuèrent à perfectionner peu à peu mais définitivement l’utilisation de la vapeur et de l’hélice comme indispensable force motrice des unités de la Marine de guerre du gouvernement
français.
1844. Louis Édouard rejoint François d’Orléans prince de Joinville, alors contre-amiral et chef de l’escadre qui le 15 août bombarda Mogador : il y commande une colonne de débarquement. Le 17
octobre, il est nommé capitaine de vaisseau. De retour à Paris, il accompagne le duc de Broglie pour obtenir de l’Angleterre le droit pour la France de disposer d’une flotte analogue à la flotte
anglaise soit environ 26 navires ; chacune de ces flottes faisant sa police sur les bâtiments de son pavillon pour combattre, châtier et empêcher les négriers, la traite des Noirs étant interdite
depuis 1815. Il devient alors (1845) chef d’état-major de cette nouvelle flotte commandée par le contre-amiral Montagnies de la Roque. Simultanément il fait paraître (1845) : «Description
nautique des côtes de l’Afrique occidentale».
1847. L’un des frères de Louis Édouard Bouët-Willaumez, Eugène Auguste Bouët (1806-1858), était, lui aussi, en poste en Afrique occidentale. Passionné, lui aussi, de navigation à vapeur d’où son
surnom «Bouët-vapeur», Auguste (capitaine au long cours qui devint capitaine de frégate et chevalier de la Légion d’honneur) se fit remarquer comme explorateur de rivières et de lagunes et comme
négociateur : «plusieurs fois envoyé (…) dans les contrées les plus inhospitalières, au milieu d’agents négriers qui pouvaient attenter à sa vie (…) pour conclure des traités d’abolition de
traite». (Contre-amiral Montagnies de la Roque, 10 janvier 1846). Or, fin 1847 et début 1848, Victor Schoelcher fut en mission d’études au Sénégal comme journaliste du National et
animateur de la campagne abolitionniste de l’esclavage. Et c’est ainsi que Schoelcher fit un voyage dans l’intérieur de la Sénégambie à bord du bateau commandé par l’un de ses amis, Auguste Bouët,
frère du capitaine de vaisseau L.É. Bouët-Willaumez lequel, en France depuis le 27 janvier 1847, conseilla au gouvernement français de reconnaître la toute nouvelle république africaine du
Libéria (fondée le 26 juin par des Noirs venus d’Amérique) et prépara la mise sous presse de son livre, précis et violent : «Commerce et traite des noirs aux côtes occidentales d’Afrique».
Après les journées insurrectionnelles de février 1848, le 3 mars, Schoelcher, étant à Paris, est demandé par F. Arago, le nouveau ministre de la Marine et des Colonies. Schoelcher est nommé
sous-secrétaire d’État à la Marine et aux Colonies et président de la Commission d’abolition de l’esclavage. Le 27 avril 1848 est adopté le décret «Abolition de l’esclavage dans nos
colonies».
Il est évident que les descriptions, précisions et propositions inscrites dans le livre de Louis Édouard Bouët-Willaumez contribuèrent à déclencher enfin la suppression officielle par le gouvernement
français de la pratique de l’esclavage. Mis sous presse en 1847, diffusé dès le 1er janvier 1848, rédigé et signé par un capitaine de vaisseau de la marine gouvernementale, l’Imprimerie Nationale à
Paris, voilà un livre qui ressemble à un texte quasi-officiel…
Commerce et traite des Noirs ? Ce «commerce criminel, longtemps encouragé par l’Europe, et dont la honte rejaillira sur cette Europe chrétienne et civilisée jusqu’à ce que ses efforts aient pu
tarir la source du mal qu’elle a fait naître(1)». Page 132 de son ouvrage «L’abolition de l’esclavage. Cinq siècles de combats XVIe-XXe siècles» (Fayard 2005), Nelly Schmidt(2) précise
à propos du « ecueil» publié le 1er janvier 1848 par L. É. Bouët-Willaumez, la conviction de ce capitaine de vaisseau : tarir et rendre inutile la traite des Noirs en abolissant l’esclavage dans
«les colonies des Caraïbes et de l’Amérique continentale».
Il est donc utile de ne pas oublier la volonté, par ce militaire français, dès 1839, de lutter (et de faire lutter) contre la traite humaine et la volonté par ce même militaire de faire substituer à
la traite des hommes, des femmes et des enfants, la traite de produits locaux «licites» (cf. carte 2 de « Commerce et traite des Noirs ») : « or en poudre ou en lingots / gomme du Sénégal / gomme
copale / Huile de Palme / Cuirs / Grains, comme Riz, Maïs, etc / Pistaches ou Arachides / Bois de teinture et d’Ebénisterie / Bois de Construction / La Cire / L’Ivoire / L’Orseille
12 septembre 1848. Le capitaine de vaisseau L. É. Bouët-Willaumez est nommé au commandement en chef de la station des Côtes occidentales d’Afrique, division navale de
l’Atlantique sud. (Jusqu’en 1850). Bien qu’efficace, son action (avec ses 15 bâtiments) sera difficile contre les négriers venant, sur ces immenses côtes, se ravitailler en esclaves (50 à 60 000 par
an) à destination principalement du Brésil (mais aussi de Cuba). Il agira notamment contre les pillages et une rébellion près de Grand-Bassam, en attaquant et en détruisant «conjointement avec
les troupes de l’État naissant des Libériens qui nous avaient appelés à leur aide, les foyers de traite d’esclaves établis par les négriers sur le territoire du Libéria lui-même(3)». 1849 verra,
aussi, sur ordre de Bouët-Willaumez, la création au Gabon de Libreville, avec des captifs destinés à devenir esclaves, libérés d’un bateau négrier brésilien arraisonné par la marine française.
Le 6 octobre 1849 L. Édouard Bouët-Willaumez est promu commandeur de la Légion d’honneur.
5 juillet 1853. L. Édouard Bouët-Willaumez est chef d’état-major du vice-amiral Hamelin (1796-1864) commandant en chef de l’escadre de Méditerranée (en juillet 1854 : armée navale de la Mer
Noire).
Contre-amiral (12 août 1854), L. É. B.-W. prend part active à la guerre de Crimée (1854 et 1855). (Entre autres Odessa, Eupatoria, Sébastopol), les troupes alliées étant commandées par Saint-Arnaud
et Lord Reaglan.
Le 12 septembre 1854, lorsque fut choisie, sur conseil de L. É. B.-W., la plage d’Old-Fort pour débarquer, B.-W. se rendit à terre en baleinière avec Canrobert, qui avait remplacé Saint Arnaud
victime du choléra le 26 septembre 1854 : «En 20 minutes, 5000 hommes sont à terre». (« Les Contemporains »). «Jamais le génie guerrier de notre nation, jamais la perfection des
institutions auxquelles nous devons notre armée, notre marine, notre corps d’officiers ne s’est révélé avec plus d’éclat. L’histoire rendra justice à l’amiral Bouët et aussi aux généraux de
Martimprey et Trochu. Ce furent les auteurs de cette merveilleuse entreprise où tout était à organiser et où tout fut prévu(4)».
La plaque de grand officier de la Légion d’honneur, « chaleureusement » demandée par le vice-amiral Hamelin, lui sera accordée le 12 juin 1856.
Entre temps, il fait partie d’une Commission chargée de faire adopter systématiquement la machine à vapeur et l’hélice sur les nouvelles unités de la Marine de guerre (1855).
Le 15 décembre 1855, Louis Édouard B.-W. est nommé commandant en chef de la station navale du Levant. (Jusqu’en septembre 1857). (Il sera chargé de conduire en Grèce un corps expéditionnaire afin
d’aider à rétablir le calme).
En décembre 1855, il fait paraître à Paris («Librairie militaire») un ouvrage : «Batailles de terre et de mer jusques et y compris la bataille de l’Alma», avec plusieurs annexes dont la
notice de F. ARAGO sur les machines à vapeur et un «projet de tactique navale pour une flotte de vaisseaux à vapeur à hélice».
29 décembre 1856 : commandeur de l’Ordre du Bain (Royaume Uni - n° inv. 09763 a et b).
• Croix en or et émail, les centres rivetés sur le bas de la légende, nombreux poinçons sur la bélière : de titre à la tête de
léopard, de date « e » pour l’année 1820, et d’orfèvre « IN » (ce poinçon vu sur d’autres croix de commandeur est celui d’un orfèvre non identifié, cf. James Risk, The History of the Order of
the Bath, Spink, Londres, 1972, p.128). Largeur : 53,5 mm - hauteur : 60 mm.
• Plaque en argent, travaillée en pointes de diamant, entièrement repercée, le centre en or et émail en plusieurs parties finement ciselées, au revers une épingle de suspension en
or, poinçon « JS » (à identifier).
Suivant la règle commune à la majorité des anciens ordres de chevalerie, les insignes de l’ordre du Bain n’étaient remis qu’à titre viager au chevalier (article XXIII des statuts de 1847). Ainsi, à la mort du titulaire, ses héritiers devaient rendre la croix et éventuellement le collier à la chancellerie de l’ordre, afin que ceux-ci puissent être remis - après réparation si nécessaire - à un nouveau récipiendaire (les plaques officielles, en broderie, étaient exclues de cette obligation de retour). Voilà pourquoi, l’amiral se vit remettre en 1856 cette belle croix datant de 1820. Par dérogation spéciale, à partir de 1856, les étrangers reçus membres honoraires de l’ordre - dans les faits, les officiers français nommés pour la campagne de Crimée - ne furent plus soumis à cet article des statuts, et leurs héritiers purent conserver les croix et plaques, les colliers continuant à devoir faire retour à l’ordre (ceci fut parfois théorique, cf. le collier du maréchal Vaillant conservé au musée des Beaux-Arts de Dijon).Ces nominations de 1856 donnèrent lieu à une autre innovation, la remise officielle de plaques métalliques aux grands-croix et commandeurs étrangers. En effet, il fut considéré comme plus convenable de remettre aux membres étrangers des plaques en argent ciselé au lieu des plaques en broderie sur carton - certes officielles - cependant jamais portées par les titulaires britanniques. Ainsi le Prince Albert, à propos d’une plaque à remettre au comte Mensdorff, cousin de la reine, disait-il : « Of course I mean the star as is usually worn, and not the paper star supplied by the Lord Chamberlain’s Office » (cf . Peter Galloway, The order of the Bath, Phillimore, 2006, p.409). Ces deux mesures, conservations des insignes et remise de plaques métalliques, furent étendues à tous les membres de l’ordre du Bain au cours de l’année 1858.
1857 : médaille de Crimée avec barrettes « Mer d’Azoff » et « Sébastopol ». Médaille du modèle officiel par Wyon, avec deux barrettes de fabrication française. Diamètre : 36 mm. Ci-dessous à gauche, n° inv. 09761.
1857 : commandeur du Medjidié (Turquie).
Étoile de 3e classe (commandeur), en argent, or et émail, fabrication turque, médaillon central en or frappé de la tughra du sultan Abdul-Medjid, bordé de la légende de
l’ordre en turc sur quatre cartouches émaillés rouges : PATRIOTISME - ZELE - LOYAUTE - 1268 (1852). Largeur : 59 mm - hauteur : 88 mm, n° inv. 09764. Ci-dessous à milieu.
1860 : médaille d’Italie.
Médaille du premier type, en argent, au profil non lauré de l’empereur sur fond ligné, la couronne de lauriers faiblement découpée, signature à l’ancre de marine de Barre sous le nœud de ruban. Diamètre : 28 mm, n° inv. 097762. Ci-dessous à droite.
1er avril 1859 : membre titulaire du Conseil des travaux de la marine. Mais le 27 avril, c’est la guerre d’Italie et il rejoint, en Adriatique, l’escadre du vice-amiral ROMAIN-DESFOSSÉS. L’armistice est signé à Villafranca le 8 juillet.
1860 grand officier de l’Ordre militaire de Savoie (Royaume de Sardaigne - n° inv. 09765 a et b).
• Croix en or et émail, les centres en une seule partie, la couronne très en relief, les arches ornées de perles, poinçon piémontais
à la tête d’aigle. Largeur : 52 mm - hauteur : 78 mm.
• Plaque en argent, travaillée en pointes de diamant, entièrement repercée, appliquée de la croix de l’ordre, le centre en une seule partie, les lames des épées en émail peint, au
revers, système de suspension par double épingle basculante, poinçon piémontais à la tête de lion. Diamètre : 75 mm.
9 juillet 1860 : L. É. Bouët-Willaumez est vice-amiral.
4 août 1860 : Préfet maritime à Cherbourg.
8 mars 1861 : Préfet maritime à Toulon. Il organise l’embarquement des troupes françaises pour l’expédition du Mexique. Le 24 octobre 1863, après l’avoir reçu dans l’hôtel de la Préfecture maritime à
Toulon, il «salue sur rade comme Roi des Hellènes» Guillaume de Danemark qui sera couronné roi des Hellènes le 31 sous le nom de Georges Ier, en remplacement du roi Othon destitué en 1862.
5 avril 1864 : il est nommé commandant en chef de l’escadre d’évolutions de la Méditerranée. Son pavillon flotte sur le Ville de Paris puis sur le cuirassé à éperons
Solférino.
Il met au point de nouvelles tactiques pour cuirassés. En 1864, il publie une «Tactique supplémentaire à l’usage d’une flotte cuirassée», rééditée en 1868. Une mission le mène à Tunis (la
France considérant la régence de Tunis autonome de l’empire ottoman).
1862 : grand officier de Saint-Maurice et de Saint-Lazare (Royaume de Sardaigne - n° inv. 09766 a et b).
Ensemble de grand officier :
• Croix en or et émail, les bords striés, poinçon piémontais à la tête d’aigle. Largeur : 53 mm - hauteur : 85 mm.
• Plaque en argent, travaillée en pointes de diamant, entièrement repercée, appliquée de la croix de l’ordre en or et émail, les bords striés, au revers une épingle de fixation, avec
deux crochets latéraux. Diamètre : 80 mm.
1863 : grand-croix de l’Ordre de Pie IX (Vatican - n° inv. 09767a et b).
- Bijou d’écharpe en or et émail, fabrication romaine en plusieurs parties. Largeur : 60 mm - hauteur : 64 mm.
- Bijou de sautoir, en or et émail, poinçon de Rome. Largeur : 58 mm - hauteur : 62 mm.
- Plaque en argent, or et émail, fabrication romaine très bombée, en plusieurs éléments, au revers, système de suspension par double épingle basculante, poinçons illisibles. Diamètre : 72 mm.
Anachronisme ou commodité, le port d’un insigne en sautoir par un grand-croix ne trouve pas d’explication statutaire à cette époque.
1865 : grand-croix du Sauveur (Grèce - n° inv. 09768 a et b).
Ensemble de grand-croix du second modèle (après 1862) :
- Croix en or et émail, poinçon à la tête d’aigle. Largeur : 71 mm - hauteur : 108 mm.
- Plaque en argent, or et émail, au revers la marque du fabricant « Lemaitre rue coquillère n° 40, Paris, Fabrique d’ordres français et étrangers », une épingle de suspension et deux crochets latéraux, poinçon à la tête de sanglier. Diamètre : 82 mm
1865 : classe majeure du Nichan al Iftikhar (Régence de Tunis - 09769 a et b).
Ensemble de classe majeure ou grand cordon au monogramme de Mohamed es Sadok Pacha Bey (1858-1882) :
- Étoile en argent et émail, revers uni avec le poinçon de la Monnaie du Bardo. Largeur 60 mm - hauteur : 85 mm.
- Plaque en argent et émail, au revers une épingle de suspension et deux crochets latéraux, poinçon de la Monnaie du Bardo. Diamètre : 83 mm.
1865 : A la tête de l’escadre, il accompagne Napoléon III lors de la visite de l’empereur en Algérie. Peu après il sera élevé à la dignité d’amiral ce qui lui permet d’être nommé sénateur le 5 août 1865.
7 avril 1866 : il quitte son commandement afin de siéger au Sénat.
29 décembre 1866 : Médaille militaire (Puisqu’il fut commandant d’armée)
Insigne en demi-taille du second modèle, en argent, vermeil et émail. Poinçon à la tête de sanglier, largeur : 16,5 mm - hauteur : 29,5mm, n° inv. 09760.
1867 : très apprécié de Napoléon III et compte tenu de la tension grandissante entre France et Prusse, il est chargé par l’empereur de préparer, dès le 8 avril, un projet d’expédition contre les
côtes prussiennes de la Baltique avec éventualité de débarquement.
30 décembre 1868 : grand-croix de la Légion d’honneur (n° inv. 09753)
Bijou de grand-croix, en or et émail d’époque Louis-Philippe, les centres en deux parties du modèle du Second Empire, sur le revers l’aigle à la tête à gauche. Poinçon à la tête de bélier (en usage de 1819 à 1838), largeur : 68 mm - hauteur : 94 mm.
Ce bijou est probablement celui de son père adoptif, le vice-amiral Jean-Baptiste Philibert comte Willaumez (1761-1845), élevé à la dignité de grand-croix de la Légion d’honneur en 1837), mais modifié sous l’empire.
22 juillet 1870 : il reçoit le commandement de l’escadre du Nord dont le principal objectif est d’assurer le blocus des côtes allemandes. Hélas, il ne put disposer de
ce qu’il avait conseillé et demandé. Il ne put disposer du nombre prévu de navires, ni de navires à faible tirant d’eau ni de troupes de débarquement malgré les prévisions initiales d’un corps
expéditionnaire de 40 000 hommes (1/5e de l’Armée). (C’est ainsi que l’infanterie de marine vint défendre Paris).
Si le Haut commandement français de la Baltique, dont le vice-amiral Bouët-Willaumez, avait disposé de ces troupes de débarquement pour prendre à revers les Prussiens, la défaite de Sedan aurait
peut-être pu être évitée et le déroulement de la guerre aurait été différent.
Juin 1871, il fait paraître (« Librairie militaire ») : « Questions et réponses au sujet de nos forces navales ».
Il décède, « en activité », le 9 septembre 1871 à Maisons-Laffitte. Le 13, il est inhumé à Paris au cimetière du Père Lachaise : « Selon les dernières volontés de l’amiral Bouët-Willaumez, il ne
lui a pas été rendu d’honneurs militaires(Journal officiel, 14 septembre 1871)».
Voici ce qu’écrit Michèle Battesti dans le Dictionnaire d’histoire maritime sous la direction de Michel Vergé-Franceschi (président de la Société française d’histoire maritime), (Laffont,
2002) : « Mort d’une maladie de foie contractée au Sénégal, Bouët-Willaumez est un des officiers les plus influents du Second Empire. Loin de se contenter de soutenir les innovations (vapeur,
éperon, blindage), il a œuvré à l’adaptation des tactiques et fut un des promoteurs avec son protégé Grivel de la défense des côtes et des ports ». J’ajoute cette phrase écrite par L.É.
Bouët-Willaumez, parue en 1855 page 95 de son ouvrage Batailles de terre et de mer : «Serait-il vrai enfin qu’un jour, à la grande unité des États-Unis d’Amérique, nos contrées
opposeront l’unité, non moins formidable, des États-Unis d’Europe ?».
N.B. Il est indiqué dans les archives familiales une autre décoration donnée à Louis Édouard Bouët-Willaumez: une médaille de sauvetage. Date et médaille non retrouvées à ce
jour.