La Grand-croix de la Légion d'honneur du maréchal Mortier

Mme Isabelle du Pasquier, Conservateur du Musée

 

 

Le Musée de la Légion d'honneur a acquis dernièrement en vente publique quelques-uns des insignes de la Légion d'honneur du maréchal Mortier. La Société des Amis, grâce à la générosité d'un de ses administrateurs, a participé largement à cet important enrichissement des collections du Musée. Achat important, en effet, d'une part en raison de la qualité des décorations: une plaque du ler Empire en canetille, une grand-croix et une plaque en or émaillé de la Monarchie de Juillet dans un état superbe.

Plaque de Grand Aigle du Maréchal Mortier (Premier Empire)

Mais en raison surtout de la personnalité de celui à qui appartenaient ces insignes: le Maréchal Mortier, Grand Chancelier de la Légion d'honneur sous la Monarchie de Juillet. Adolphe, Edouard, Casimir, Joseph Mortier est né au Cateau, dans le Nord, le 13 février 1768, d'un marchand de toiles, futur député du Tiers-Etat. D'abord destiné au commerce, à la faveur des guerres de la Révolution, il embrassa la carrière des armes où se révélèrent rapidement sa valeur et son courage. Capitaine au Ier bataillon des Volontaires du Nord, il combattit avec ardeur sur les champs de bataille de Jemmapes, Nerwinden, Hondschoote, Fleurus. En 1796, il reçut le commandement des avant-postes de l'armée de Sambre-et-Meuse et fit preuve partout d'une héroïque intrépidité. Après s'être distingué à l'armée du Danube en 1799, ce qui lui valut d'être promu général de division, il prit, en 1803, le commandement de l'armée du Hanovre et signa la convention de Sublingen qui donnait l'Electorat à la France. Il sut administrer ce pays avec beaucoup de justice et d'humanité.


Il fit partie de la première grande promotion des maréchaux de l'Empire du 29 floréal an XII (20 mai 1804), ainsi que de celle des grands aigles de la Légion d'honneur le 1er février 1805, et fut nommé chef de la seconde cohorte de la Légion d'honneur. Après s'être distingué à Leoben, il prit Cassel et Hambourg et reçut de l'empereur le duché de Trévise à la paix de Tilsitt.
Commandant le 5e corps d'armée d'Espagne, il prit part à la conquête de l'Andalousie, puis rentra en France en 1811.
Gouverneur de Moscou en 1812 après avoir servi à la Moskowa, il couvrit la retraite de la Grande Armée à la Bérésina.
En 1813, commandant en chef de la Jeune Garde en Allemagne, il combattit à Dresde et Leipzig. Pendant la campagne de France, il fut présent sur tous les fronts et fut un héroïque défenseur de Paris.
Fait pair de France et chevalier des ordres du roi sous la Restauration, il refusa de siéger au conseil de guerre chargé de juger le Maréchal Ney.
Rallié à la Monarchie de Juillet, il fut nommé grand chancelier de la Légion d'honneur le 11 septembre 1831, puis ministre de la Guerre et président du Conseil en 1834.
Mais le 28 juillet 1835, aux côtés du roi qui passait en revue la Garde Nationale sur le boulevard du Temple, il fut blessé mortellement par une décharge de la machine infernale de Fieschi.
Ainsi disparut ce grand soldat que la mort n'avait pu atteindre sur tant de champs de bataille.