4- Les médailles

En comparaison des ordres et des décorations, les médailles sont relativement récentes et datent du début de la Renaissance. Les premières médailles apparurent en 1402 à la cour de Jean duc de Berry avec la série de la légende de la croix. Ce prince fastueux et mécène se mit alors à collectionner des pièces romaines montées sous forme de bijoux qui furent prises pour des médailles alors même que l’Antiquité n’a jamais connu que des monnaies. L’invention de la médaille -avec les portraits de souverains ou d’hommes illustres frappés en  souvenir et non pas en tant qu’instrument monétaire– revient au peintre Pisanello en 1439. Les réalisations de ce dernier (exposés au musée de Bargello à Florence) sont parmi les plus célèbres avec celles de Benvenuto Cellini : on peut citer les médailles de Lionel d’Este, de l’empereur Jean VIII Paléologue, des frères Malatesta, d’Alphonse  de Naples.

Dès le XVe siècle, les collections de médailles –en réalité largement numismatiques- sont très nombreuses (notamment Lionel d’Este et Alphonse d’Aragon déjà cités). Les plus grands amateurs sont les souverains, en particulier l’empereur Maximilen de Habsbourg et Louis XIV. On doit à ce dernier le cabinet des médailles de la bibliothèque nationale et la création en 1663 d’une Académie (la future Académie des Inscriptions et belles lettres) dont la mission fut de préparer une  « histoire métallique » avec la frappe de médailles devant célébrer les évènements du règne (publiée en 1694 sous le titre d’ Histoire de Louis le grand par les médailles).

Le succès des médailles ne va jamais se démentir. Il reste marqué par une abondance et une diversité de productions à toutes les époques. Les meilleurs artistes et graveurs ont excellé dans cet art.

Les médailles pendantes commémorant des campagnes militaires sont d'abord apparues en Russie au début du XVIIIe siècle. Les Britanniques adoptèrent ensuite cette coutume. En 1847, ils instituèrent la « General Service Medal » pour les soldats ayant participé aux campagnes de 1795 à 1814. En 1856, après l'heureuse issue de la guerre de Crimée, au cours de laquelle Anglais et Français avaient combattu côte à côte, la reine Victoria créa la médaille de Crimée pour les militaires ayant débarqué en Orient avant la prise de Sébastopol (8 septembre 1855).


Le décret signé le 26 avril 1856 par Napoléon III, autorisant le port de cet insigne, introduisit en France la première médaille commémorative officielle d'une campagne. Fort de cet exemple, le décret  impérial du 12 août 1857 créa la médaille de Sainte-Hélène, destinée à tous les vétérans des campagnes de la Révolution et de l'Empire. Première médaille française destinée à signaler la participation à des faits de guerre, sur vérification des états de service du bénéficiaire, elle était accompagnée d'un brevet et d'une remise officielle lors d'une cérémonie. Napoléon III institua par la suite en 1859, la médaille d'Italie. La médaille de Chine créée en 1861 fut destinée aux 8000 participants de l'expédition de 1860. La médaille de l'expédition du Mexique fut créée en 1863 pour être attribuée aux militaires présents au Mexique de 1862 à 1867. La République perpétua cette nouvelle tradition. La «Médaille de 1870» fut créée le 9 novembre 1911, mais guère portée, les rayures noires sur le ruban vert étant signe de deuil. On compte également les médailles du Tonkin (1885), de Madagascar (1886 et 1896), du Dahomey (1892), de Chine (1901), et du Maroc (1909).

 

La Première Guerre mondiale et ses suites ont donné lieu à une série de médailles commémoratives officielles - Interalliée dite de la Victoire, commémorative de la Grande Guerre de 1914-1918, de Syrie-Cilicie, des Dardanelles et médaille de l'armée d'Orient du maréchal Franchet d'Esperey - ou non officielles, comme la médaille de Verdun.


La Seconde Guerre mondiale, les conflits de la deuxième moitié du XXe et du début du XXIe siècles - décolonisation, opérations internationales de maintien de l'ordre ou de rétablissement de la paix - occasionnèrent également la création de nombreuses médailles. On peut citer la médaille commémorative de la Guerre 1939-1945 (avec ses 16 agrafes) (1946), celle de la campagne d'Italie (1953), la médaille française des Opérations en Corée (1952), celle de la campagne d'Indochine (1953), celle des opérations au Moyen-Orient (canal de Suez) en 1957, celle des opérations en Afrique du Nord (1958). La Médaille commémorative française, enfin, date de 1995 et celle d'Afrique du Nord, créée en 1997, a été remplacée par celle de la Reconnaissance de la Nation en 2002.


De toutes les médailles commémoratives, la Médaille coloniale, créée par la III République et rebaptisée Médaille d'outre-mer sous la Ve République en 1962, est la plus célèbre. Instituée avec effet rétroactif par l'article 75 de la loi de finances du 26 juillet 1893, mais distribuée deux ans plus tard à partir du 4 juin 1895, elle était destinée aux troupes ayant pris part à des opérations militaires de pacification au sein des territoires de l'ancien empire colonial français. Les fonctionnaires ou les civils ayant assisté des opérations militaires ou participé «à des missions coloniales périlleuses » purent la recevoir à partir de 1898, et en mars 1914, on instaura la possibilité d'attribuer la Médaille coloniale sans agrafe aux militaires ayant servi plus de six ans dans les colonies. L'originalité de cette médaille commémorative tient à la diversité de ses agrafes dont l'inspiration est copiée sur les usages britanniques. On en dénombre 59 officielles pour la Médaille coloniale, dont 9 pour les campagnes antérieures à la fondation de la IIIe République. Parmi elles, certaines sont en or, et extrêmement rares : de l'Atlantique à la Mer Rouge, Centre Africain, Mission Saharienne, Gabon-Congo. Il existe aujourd'hui pour la médaifle d'Outre-Mer 12 agrafes qui rappellent les théâtres d'opération.